Un constat s’impose dans le paysage politique calédonien
Les autorités coutumières, pourtant omniprésentes dans l’organisation sociale kanak, observent un silence remarqué à l’heure des négociations cruciales sur l’avenir institutionnel du territoire. Ce mutisme organisé, soutenu par des subventions publiques conséquentes, soulève des questions fondamentales sur la place réelle de la coutume dans le processus de décision.
Une présence institutionnelle, une absence politique
Les structures coutumières bénéficient d’un financement substantiel :
– 1 milliard de francs CFP annuels du budget de la Nouvelle-Calédonie
– Institutions concernées :
* ADCK (Agence de développement de la culture kanak)
* DACC (Direction des affaires coutumières)
* ALK (Académie des langues kanak)
* Sénat coutumier
* Travaux sur terres coutumières
Pourtant, cette reconnaissance financière ne se traduit pas par une influence politique tangible.
Les raisons d’un silence
Plusieurs facteurs expliquent cette retenue des autorités coutumières :
- Une stratégie délibérée : conscience des pièges du processus politique actuel
- Un positionnement prudent : refus de s’engager sans possibilité de retrait
- Une génération vieillissante : difficulté à s’imposer dans les débats contemporains
- Un système institutionnel qui privilégie les partis politiques aux voix coutumières
Une parole qui se déplace
En marge des institutions, la parole coutumière trouve d’autres canaux :
– Retour dans les cases et les districts
– Mobilisation du Conseil des Grands Chefs (Inaat Ne Kanaky)
– Prise de parole d’Hippolyte Sinewami Htamumu à l’ONU
– Revendications souverainistes sur les terres coutumières
– Échanges informels entre clans et jeunes générations
Les risques d’une marginalisation
Ce décalage entre reconnaissance formelle et influence réelle pose problème :
– Pour le processus politique : absence d’une voix essentielle dans les négociations
– Pour la transmission culturelle : risque de dissociation entre institutions et pratiques vivantes
– Pour la cohésion sociale : frustration des jeunes générations kanak
Un appel à la prise de parole
Face à cette situation, un message s’adresse directement aux détenteurs de la parole coutumière :
« Le silence, en politique, est un choix. Et ce qui n’est pas reconnu ne survivra pas.«
Les enjeux sont clairs :
– Refuser l’instrumentalisation des structures coutumières
– Retrouver une voix indépendante des partis politiques
– Assurer la transmission aux jeunes générations
– Prendre position dans le débat institutionnel
Alors que la Nouvelle-Calédonie s’apprête à tourner une nouvelle page de son histoire, la question se pose : les autorités coutumières sauront-elles sortir de leur silence stratégique pour peser sur les décisions à venir ?
Leur légitimité traditionnelle et leur connaissance intime du peuple kanak en font des acteurs incontournables – à condition qu’ils acceptent de parler.