Alors que les tensions politiques et économiques persistent en Nouvelle-Calédonie, l’Élysée a annoncé, le 29 mai, l’organisation d’une rencontre à Paris mi-juin (début juillet selon les dernières informations) pour clarifier les enjeux institutionnels, économiques et politiques du territoire. Cette initiative, pilotée par Emmanuel Macron lui-même, marque un tournant dans le dossier calédonien, traditionnellement géré par le ministère des Outre-mer.
Un désaveu pour Manuel Valls ?
Gil Brial, deuxième vice-président de la province Sud et membre de la délégation loyaliste, y voit une « reprise en main » par le président de la République.
Quand on regarde l’histoire, les accords de Matignon-Oudinot ont été portés par Michel Rocard, l’accord de Nouméa par Lionel Jospin. Là, c’est l’Élysée qui prend les rênes », souligne-t-il, interprétant ce mouvement comme un recadrage des méthodes de Manuel Valls, dont le projet pour la Nouvelle-Calédonie a été vivement critiqué.
Qui sera autour de la table ?
Si les détails restent flous, Gil Brial confirme que les discussions incluront non seulement les forces politiques locales, mais aussi des acteurs économiques.
Les entreprises calédoniennes sont en grande difficulté. Il faut une relance urgente, et pour cela, l’État doit s’engager davantage, notamment sur la filière nickel et la sécurisation des investissements, insiste-t-il.
Le projet Valls enterré à Deva ?
Le ministre des Outre-mer avait présenté, lors d’un conclave à Deva, une proposition de « souveraineté en union avec la France », qualifiée par les loyalistes d’« État associé déguisé ».
C’est l’indépendance, mais avec une délégation partielle de compétences à la France. Les Calédoniens ont dit non trois fois à l’indépendance, ce projet est inacceptable, martèle G.Brial.
Selon lui, cette proposition a été rejetée par les loyalistes mais soutenue par les indépendantistes et certains partis autonomistes, creusant un fossé entre les camps.
Le contre-projet loyaliste : un fédéralisme dans la République
Face à cela, les partisans du maintien dans la France défendent un modèle fédéral.
La Nouvelle-Calédonie serait un territoire fédéré, inscrit définitivement dans la Constitution, avec des compétences renforcées pour les provinces et une fiscalité locale », explique G.Brial. Ce projet exclut toute partition, souvent brandie comme un épouvantail selon lui.
Élections : le casse-tête du corps électoral
Avec des élections provinciales prévues avant fin novembre, la question du corps électoral reste explosive. Les loyalistes plaident pour une ouverture « glissante » (10 ans de résidence), mais G.Brial reconnaît les obstacles : « Modifier la Constitution nécessite une majorité des 3/5e, et le RN s’y oppose. » Une solution alternative ? Un accord local pour élargir partiellement le scrutin, incluant natifs et conjoints.
Marine Le Pen et Bellamy : deux visions opposées
La visite récente de Marine Le Pen, prônant une « pause institutionnelle » et un référendum dans 40 ans, a laissé un goût amer.
Son analyse est erronée : elle sous-estime la volonté indépendantiste et ignore les réalités post-13 mai, critique G.Brial.
À l’inverse, il salue la position de François-Xavier Bellamy (LR), ferme sur le respect des référendums et la condamnation des violences.
La rencontre à l’Élysée s’annonce décisive. « Les Calédoniens méritent une solution durable, pas des calculs politiques pour 2027 », lance G.Brial, déterminé à éviter que le territoire ne devienne un « marchepied électoral ». Reste à savoir si les divergences pourront être surmontées – ou si l’archipel s’enlisera dans une nouvelle impasse.