Un an après les violences de mai 2024, le député Nicolas Metzdorf dénonce un abandon progressif de l’État et une perte de vision stratégique pour l’archipel. Entre silence de Paris, division politique locale et montée des inquiétudes, l’élu tire la sonnette d’alarme.
Le 13 mai 2024, la Nouvelle-Calédonie sombrait dans une vague de violences d’une ampleur inédite. Émeutes, pillages, destructions : le territoire est secoué par une crise politique qui dégénère brutalement. Un an plus tard, Nicolas Metzdorf, député Renaissance de la première circonscription, déplore un silence assourdissant autour de la situation.
Tout le monde a oublié la Nouvelle-Calédonie. Plus personne n’en parle.
Sur le plateau, le ton est grave. L’élu rappelle que 14 personnes ont perdu la vie dans ces événements, que plus de 2 milliards d’euros de dégâts ont été recensés et que 20 000 emplois ont disparu, selon les chiffres de la Chambre de commerce et d’industrie.
« La parole de la France manque »
Selon lui, le problème est autant sécuritaire que politique. Si la présence des forces de l’ordre a été renforcée – une vingtaine d’escadrons de gendarmerie sont désormais mobilisés sur le territoire –, cela ne suffit pas.
Ce qu’il manque aujourd’hui, c’est la parole de l’État », insiste-t-il.
Il pointe une forme de désengagement de Paris, alors même que le territoire a, à trois reprises, choisi de rester dans la République lors des référendums de 2018, 2020 et 2021.
Une France hésitante, un territoire stratégique
Pour Metzdorf, la question calédonienne ne peut être traitée à la légère. Il rappelle que la France est une puissance mondiale, entre autres, grâce à sa présence sur l’ensemble des fuseaux horaires. Et la Nouvelle-Calédonie, dit-il, joue un rôle majeur dans cette équation.
Ce n’est pas une petite île. C’est deux fois plus grand que la Corse, et c’est un quart des ressources mondiales de nickel.
Dans un monde où la Chine lorgne Taïwan, la Russie pousse ses frontières en Ukraine et les États-Unis s’intéressent au Groenland, l’abandon de la Calédonie serait, selon lui, un signal de faiblesse.
Valls, Le Pen et le flou stratégique
Nicolas Metzdorf critique ouvertement les positions récentes de certains responsables politiques venus sur le territoire. Il évoque notamment la visite de Manuel Valls, qui aurait, selon lui, laissé entendre que l’option d’une indépendance-association devait être envisagée. Un positionnement perçu comme un recul de l’État.
Il revient également sur le déplacement de Marine Le Pen, jugé maladroit. Celle-ci a proposé un nouveau référendum, tout en affirmant qu’il ne fallait pas exclure l’indépendance.
On a besoin de clarté. Que veut la France pour ses Outre-mer ?
Les leçons d’un territoire oublié
Pour Metzdorf, le sentiment d’abandon est profond. Derrière la colère, il y a aussi l’inquiétude. L’élu prévient : si la France commence à lâcher la Nouvelle-Calédonie, d’autres territoires pourraient suivre.
Aujourd’hui c’est la Calédonie. Demain, ce sera peut-être Mayotte, la Guyane ou la Polynésie.
Il évoque la tentation d’une partie de l’opinion à considérer ces territoires comme lointains, coûteux, peu prioritaires. Une logique qu’il juge dangereuse et contraire aux intérêts stratégiques de la France.
La sécurité oui, mais une ambition surtout
Tout en saluant les efforts du ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, pour renforcer la sécurité, Nicolas Metzdorf souligne que la réponse doit être politique.
Les indépendantistes resteront indépendantistes. Nous, on défend l’attachement à la France. Mais il faut redonner une ambition au territoire.
L’enjeu : ne pas se recroqueviller
Face à un exécutif perçu comme hésitant, Metzdorf appelle à retrouver une ambition nationale. Il s’inquiète de ce qu’il appelle un « recroquevillement », alors que les grandes puissances mondiales, elles, cherchent à s’étendre.
Dans un monde instable, où les rivalités géopolitiques se multiplient, la France ne peut, selon lui, se permettre de perdre un territoire aussi stratégique.
La Nouvelle-Calédonie reste française, pour l’instant. Mais pour combien de temps si la France elle-même semble l’oublier ?