Jean Lèques : le bâtisseur de Nouméa, homme de paix et figure historique du Caillou
Maire de Nouméa durant 28 ans et premier président du gouvernement, Jean Lèques laisse un héritage durable en Nouvelle-Calédonie.
Un homme enraciné, au service des Calédoniens
Jean Lèques, décédé en juin 2022 à l’âge de 90 ans, demeure l’une des figures les plus marquantes de la vie politique calédonienne. Alors que le collège de Magenta s’apprête à porter son nom, son parcours impose le respect par la longévité de son engagement, sa simplicité et son attachement profond au territoire.
Né en 1931, il suit des études de droit à Grenoble avant de revenir définitivement sur sa terre natale. Devenu notaire en 1965, il s’engage rapidement dans la vie publique, animé par un sens aigu du devoir et de la proximité. Son quartier, la Vallée du Tir, reste l’un des symboles de son ancrage local, humain et modeste.
Son engagement politique, d’abord au sein de l’Union Calédonienne puis du RPCR, repose sur des valeurs de dialogue, de foi et d’humanité. Jean Lèques aura marqué des générations par son écoute et sa constance, dans un territoire souvent traversé par les tensions.
Le maire bâtisseur d’une capitale moderne
Maire de Nouméa de 1986 à 2014, Jean Lèques aura profondément transformé le visage de la capitale. En 28 années de mandat, il a modernisé la ville sans jamais perdre de vue le quotidien des habitants.
Parmi ses réalisations emblématiques : l’aménagement de la Place des Cocotiers, la métamorphose de la Rivière Salée avec ses équipements publics (piscine, médiathèque, mairie annexe, terrains de sport), la rénovation de la promenade de l’Anse Vata, ou encore la restauration de la Maison Célières.
Visionnaire sur les enjeux environnementaux, il est aussi à l’origine du vaste programme d’assainissement de Nouméa, visant à mettre fin aux rejets polluants dans les baies. Il a également créé la police municipale et instauré la vidéo-protection, bien avant que ces outils ne se généralisent ailleurs.
Son action, à la fois sociale et urbaine, s’est aussi traduite par la création de Logicoop, une structure d’accès au logement portée avec des partenaires syndicaux.
Une figure de la paix, un artisan de l’histoire
Jean Lèques n’a pas seulement transformé la capitale. Il fut aussi un acteur majeur de l’histoire institutionnelle de la Nouvelle-Calédonie. Signataire des accords de Matignon en 1988 et de l’accord de Nouméa en 1998, il devient en 1999 le premier président du gouvernement calédonien, incarnant la transition post-conflit et la volonté de dialogue entre les communautés.
Sa foi chrétienne, discrète mais constante, a guidé son engagement au service du bien commun. Commandeur dans l’ordre de Saint-Grégoire, Grand officier de la Légion d’honneur, il est respecté bien au-delà des clivages partisans.
Certaines ambitions resteront inachevées, comme les projets du Carré Rolland, du front de mer de la petite rade ou du centre commercial Ballande, mais son empreinte demeure indélébile dans le tissu urbain et la mémoire collective.
Témoignage : « Jean Lèques, c’était un vrai père pour Nouméa »
J’ai grandi à la Vallée du Tir. Je me souviens encore de ses balades, toujours le sourire aux lèvres, toujours un mot pour les gens. Jean Lèques, c’était pas juste un maire, c’était un repère. Un homme simple, droit, qui connaissait ses habitants par leur prénom. Quand il parlait de Nouméa, on sentait que c’était pas de la politique, c’était de l’amour.
J’ai travaillé comme agent municipal. Je peux vous dire qu’avec lui, on se sentait écouté. Il venait nous voir, il posait des questions, il remerciait. Il ne faisait pas semblant. Il croyait dans ce qu’il faisait. Ce n’était pas un homme de coups d’éclat, mais de travail de fond. Il a transformé Nouméa avec patience, sans jamais oublier personne.
Quand il est parti, j’ai eu l’impression qu’une époque s’en allait avec lui. Aujourd’hui, on parle souvent de division, de tensions… Lui, il savait rassembler. On devrait tous se souvenir de ça.
— Jean-Paul, 63 ans, Nouméa
Un héritage vivant
Le choix de donner le nom de Jean Lèques à un collège n’est pas seulement un hommage symbolique. C’est une transmission de valeurs : humilité, engagement, écoute et vision. Dans une Nouvelle-Calédonie toujours en quête de repères et de paix durable, la figure de Jean Lèques reste une boussole.
Il fut cet homme de terrain, à l’élégance discrète, qui aura su conjuguer l’action et l’attention, la modernité et le respect des racines. Son héritage continue de parler à toutes les générations du Caillou.
@FANC