La Nouvelle-Calédonie tente de relancer son économie en plaçant le pouvoir d’achat au cœur de ses priorités sociales.
Une année charnière pour les ménages calédoniens
Un an après les émeutes de mai 2024, la Nouvelle-Calédonie traverse une crise économique et sociale sans précédent. Des milliers de foyers voient leur pouvoir d’achat s’effondrer, entre hausse des prix, pertes d’emploi et fragilisation des circuits de distribution. En réponse, le gouvernement local et l’État multiplient les mesures d’urgence pour tenter d’enrayer l’appauvrissement.
D’après les derniers chiffres de l’ISEE, l’indice des prix à la consommation a progressé de 2,4 % en mai 2025, en hausse par rapport à avril (+1,9 %). La flambée des prix alimentaires reste particulièrement marquée : +5,9 % sur un an. Le panier de courses des familles calédoniennes ne cesse de s’alourdir, dans un contexte où le coût de la vie demeure supérieur de 30 % à celui de la métropole.
Un accord pour soulager les familles calédoniennes
Ce jeudi 26 juin 2025, le gouvernement a annoncé un accord interprofessionnel de modération des prix, conclu avec les principaux acteurs du commerce local. Objectif : stopper l’envolée des prix et relancer la consommation.
Signé avec les industries de transformation, les importateurs, les enseignes de grande distribution et les petits commerçants, cet accord vise à plafonner les prix ou les marges de vente sur une liste de produits de première nécessité. Une mesure jugée vitale dans un contexte où la précarité explose : chômage post-émeutes, inflation alimentaire, hausse des inégalités…
Une inflation qui frappe les plus modestes
Selon l’ISEE-NC, les prix à la consommation ont augmenté de 1,6 % depuis les émeutes. Les prix de l’alimentation, eux, ont grimpé de 5,9 % sur un an — une hausse deux fois plus lourde pour les 20 % de ménages les plus modestes. Et malgré une légère baisse en mai (–0,2 %), la tendance reste alarmante.
Le gouvernement mise donc sur un levier immédiat : protéger le panier des Calédoniens en fixant des seuils de prix selon la taille des commerces :
- 120 produits dans les grandes surfaces
- 70 produits dans les moyennes
- 30 produits pour les petits commerces
Sont concernés : les produits alimentaires de base, les carburants, les produits d’hygiène, etc. La liste complète sera publiée par la DAE.
Des engagements concrets, un contrôle renforcé
L’accord repose sur un double engagement :
- Les fournisseurs baissent leurs prix de vente aux distributeurs ;
- Les distributeurs répercutent ces baisses « au franc le franc » en rayon.
Des contrôles rigoureux seront opérés par la Direction des Affaires économiques : disponibilité des produits, remplacement en cas de rupture, suivi des marges. Les effets sont attendus à partir du second semestre 2025, avec une amélioration potentielle du pouvoir d’achat en 2026, sous réserve de stabilité politique.
Des salaires qui stagnent, des prix qui explosent
Dans la fonction publique, l’indexation des salaires est de plus en plus contestée. Dans le secteur privé, les revalorisations salariales sont rares. Résultat : une perte réelle de pouvoir d’achat, même pour les actifs.
Les aides ponctuelles (chèques alimentation, bons de consommation) n’ont qu’un effet temporaire. Les ménages consacrent désormais plus de 40 % de leurs revenus à l’alimentation et aux charges de base — un seuil d’alerte inédit sur le territoire.
Les « invisibles » de la crise sociale calédonienne
Ils travaillent, parfois à double emploi. Ils ne sont pas dans la pauvreté, mais n’arrivent plus à vivre décemment. Ce sont les classes moyennes calédoniennes, grandes oubliées des politiques publiques. Ni pauvres, ni aidés, elles portent le fardeau de la vie chère sans soutien ciblé.
En 2025, leur situation s’aggrave. Gel des salaires, hausse des cotisations, coût de la vie en explosion : la Calédonie vacille.
Un effet ciseau : revenus figés, dépenses envolées
Enseignants, agents, infirmiers, jeunes cadres… Tous disent la même chose : le salaire ne suffit plus. Les augmentations sont inférieures à l’inflation, et le reste à vivre s’amenuise. La classe moyenne, longtemps perçue comme le socle du compromis social post-Accord de Nouméa, n’arrive plus à maintenir son niveau de vie.
Ni pauvre, ni assisté : le trou noir des politiques sociales
Les aides de 2025 — bons alimentaires, gel partiel des prix — ciblent les plus fragiles, mais la classe moyenne passe entre les mailles du filet. Trop “riche” pour les aides, pas assez pour résister.
Cette zone grise génère une colère sourde, un sentiment d’abandon, et parfois la tentation du départ vers la métropole ou l’Australie.
En 2025, le pouvoir d’achat est devenu le baromètre du malaise calédonien. Les mesures de modération des prix offrent un répit nécessaire, mais restent insuffisantes pour enrayer la précarisation rampante des classes moyennes. Restaurer la confiance implique désormais des réponses structurelles, durables, et véritablement inclusives.
Liste des produits concernés – accord interprofessionnel.pdf