La réforme des retraites continue de fracturer le paysage politique et social français. Dernier épisode en date : le conclave initié par François Bayrou, censé apaiser les tensions, vire au désaveu cinglant pour le Gouvernement. Perçu comme une manœuvre politicienne, cet échec ravive les critiques et alimente une défiance croissante dans l’opinion publique. Entre volonté de censure et appel au référendum, les Français semblent désormais vouloir reprendre la main sur un débat devenu explosif.
Le Gouvernement en ligne de mire : 63 % des Français lui imputent l’échec
C’est un constat sans appel : près de deux Français sur trois (63 %) estiment que le Gouvernement porte une responsabilité majeure dans l’échec du conclave sur la réforme des retraites, initiative lancée par François Bayrou en mars dernier. À l’opposé, seuls 8 % estiment qu’il n’en porte aucune.
Ce désaveu dépasse les clivages politiques habituels. Chez les électeurs du Rassemblement national (72 %) comme ceux du Nouveau Front populaire (78 %), le constat est clair : le Gouvernement est en première ligne. Les organisations patronales (47 % de responsabilité majeure) et les syndicats de salariés (39 %) sont jugés responsables, mais dans une moindre mesure.
À noter toutefois un renversement de perspective chez les électeurs d’Ensemble (majorité présidentielle) et de droite, qui désignent davantage les syndicats de salariés comme principaux responsables (respectivement 58 % et 57 % de responsabilité majeure), renvoyant ainsi la critique vers les opposants à la réforme.
Le conclave perçu comme une manœuvre politique
67 % des sondés considèrent que le conclave n’était qu’un « coup politique » orchestré par le Premier ministre pour éviter une motion de censure, et non une tentative sincère de consensus. Une défiance qui progresse malgré les explications du Gouvernement : ils étaient 71 % à le penser en mars.
Les électeurs du RN (77 %) et du NFP (74 %) sont les plus convaincus par ce scénario de manœuvre dilatoire. Mais même chez les soutiens d’Ensemble (44 %) et de la droite (50 %), cette critique progresse, révélant un doute croissant sur la sincérité de la démarche gouvernementale.
Une motion de censure de plus en plus soutenue
L’hypothèse d’une motion de censure contre le Gouvernement fait son chemin : 52 % des Français souhaitent désormais qu’elle soit adoptée, en hausse de 5 points en un mois. Le seuil symbolique de la majorité est franchi pour la première fois.
Sans surprise, ce sont les électeurs du NFP (71 %) et du RN (62 %) qui soutiennent le plus largement cette motion. Mais la surprise vient de la droite, où le soutien bondit de 18 points en un mois, atteignant 43 %. En revanche, les électeurs d’Ensemble y restent opposés dans leur grande majorité (78 %), et même 51 % s’y disent « totalement opposés », signe d’un réflexe de bloc loyaliste.
Le référendum, voie préférée après le fiasco
L’idée d’un référendum sur la réforme des retraites émerge comme la solution privilégiée pour 38 % des Français, loin devant le dialogue direct avec les partenaires sociaux (23 %), le renoncement à toute réforme (17 %) ou la reprise du processus parlementaire (15 %).
Chez les électeurs du RN, le soutien au référendum est massif (48 %). Ceux du NFP sont plus partagés : 35 % penchent pour un référendum, 27 % pour le dialogue. Les électeurs d’Ensemble et de droite restent divisés, entre dialogue (32 % et 26 %), référendum (25 % et 32 %) et processus parlementaire (26 % et 21 %).
Un échec aux lourdes conséquences politiques
Au-delà des chiffres, cet échec du conclave sur les retraites met en lumière l’isolement du Gouvernement dans l’opinion publique. La défiance s’élargit bien au-delà des électorats d’opposition. La mise en accusation de l’exécutif, l’interprétation stratégique du conclave et la montée du souhait de censure traduisent une crise de confiance profonde.
Le Gouvernement pourra-t-il rebondir ? À ce stade, le recours au référendum semble être la seule issue encore perçue comme légitime par une majorité relative. Une option risquée, mais peut-être inévitable.
Si vous êtes guidés par des sondages d’opinion, vous ne pratiquez pas le leadership, vous pratiquez le suivi.
Margaret Thatcher