À Nouméa, collégiens et aînés co-construisent un jardin médicinal. Un pont vivant entre les générations.
Et si l’avenir se cultivait au cœur des souvenirs ? Ce jeudi, la maison de retraite Azur Santé a accueilli la présidente de la province Sud, Sonia Backès, venue saluer un projet intergénérationnel aussi simple que révolutionnaire : associer collégiens et résidents âgés autour d’un jardin médicinal, reflet d’un savoir ancien transmis à la jeunesse.
Dans un établissement où chaque résident bénéficie d’un projet de vie personnalisé, c’est l’initiative du doyen, M. Gay, 92 ans, qui a été mise à l’honneur. Ancien ingénieur des eaux et forêts, il a choisi de créer un « Jardin Médecin » composé de plantes thérapeutiques, cultivé avec passion et mémoire. Un projet qui mêle sciences, traditions et partage, et qui transforme une maison de retraite en véritable école de la transmission.
Un jardin, des racines, et des jeunes
Le projet a pris racine en janvier, en collaboration avec le collège de Boulari. Deux jeudis par mois, les élèves de 4e et 3e SEGPA ainsi que ceux du dispositif ULIS TFC 2 viennent jardiner avec les résidents, encadrés par leurs enseignants.
Ce jardin n’est pas qu’un espace de culture : c’est un espace de dialogue, où les gestes précis des anciens rencontrent la curiosité des jeunes. À chaque passage, ces élèves découvrent des plantes locales, des récits de terrain, des savoir-faire oubliés. En retour, ils offrent leur énergie, leur écoute, leur volonté d’apprendre autrement.
Une démarche éducative, sociale et humaine qui a immédiatement séduit l’équipe d’Azur Santé, dirigée par Maryse Gauvin, mais aussi Chantale Creugnet, la directrice du collège, et les enseignants impliqués dans ce projet hors normes.
L’intergénérationnel, un enjeu politique
En présence des équipes soignantes, éducatives et des familles, la présidente de la province Sud a tenu à saluer personnellement l’engagement de tous les acteurs. « Il faut préserver et renforcer les liens entre les générations, car c’est là que se joue une grande part de notre cohésion sociale », a-t-elle insisté.
Le message est clair : face au vieillissement de la population, face à une jeunesse souvent éloignée des réalités du grand âge, il est urgent de recréer des passerelles concrètes et sensibles. À travers ce jardin, la politique sociale devient action de terrain, loin des discours abstraits.
La présence de la représentante de l’Académie des Langues Kanak a ajouté une dimension culturelle à la visite. Elle accompagne le projet dans sa dimension kanak, par la transmission de savoirs horticoles, de vocabulaire traditionnel, et de pratiques thérapeutiques autochtones. Une double mémoire – coloniale et kanak – s’enracine dans la terre partagée du jardin.
Une reconnaissance symbolique, mais forte
Pour marquer cette journée, Sonia Backès a remis à chaque élève un tee-shirt et une casquette, dans une ambiance conviviale et détendue. Une façon de valoriser l’implication de ces jeunes souvent stigmatisés dans les SEGPA ou les dispositifs ULIS, mais qui démontrent ici une intelligence humaine et sociale profonde.
Dans les yeux des résidents comme dans ceux des élèves, ce jardin a déjà produit ses premiers fruits : le respect, la considération, la transmission.
Et dans une société où les générations ont tendance à s’ignorer, cette initiative démontre qu’il est encore possible de faire société à plusieurs âges.