Washington regarde ailleurs. Pékin avance ses pions.
Hégémonie contestée : la Chine investit les territoires stratégiques
L’Asie du Sud-Est et les îles du Pacifique deviennent le théâtre d’un nouveau bras de fer entre Pékin et Washington. Longtemps en position dominante, les États-Unis ont vu leur présence s’effriter, laissant le champ libre à une diplomatie économique chinoise très active.
À Micronésie, à Palau ou encore aux îles Marshall, la Chine finance des infrastructures-clés, comme la rénovation d’aéroports ou la construction de centres de congrès. Objectif : asseoir sa légitimité locale et créer des relations de dépendance durable.
L’écho est géostratégique : comme l’a rappelé Cleo Paskal, experte au Foundation for Defense of Democracies, ces îles furent des points névralgiques lors des conflits du XXe siècle. Pékin s’inscrit clairement dans cette logique de projection de puissance.
Le tourisme comme arme d’influence : la pression douce version Pékin
Autre levier d’influence utilisé par la Chine : le tourisme stratégique. En Palau, pays qui reconnaît toujours Taïwan, les autorités dénoncent une forme de chantage touristique.
Le président paluan Surangel Whipps accuse Pékin d’avoir restreint les flux touristiques pour forcer un basculement diplomatique vers la Chine. Ce procédé n’est pas isolé : il a déjà été mis en œuvre dans les îles Salomon, qui ont signé un accord de sécurité avec Pékin en 2022. Résultat : la Chine modernise leur port principal et soutient les formations de la police locale.
Une diplomatie du portefeuille, où l’aide au développement devient un outil de pression politique.
Vers une guerre des monnaies : le yuan numérique contre le dollar
La Chine pousse aussi ses pions sur le terrain financier. En multipliant les essais de paiements transfrontaliers en yuan numérique (e-CNY), Pékin veut affaiblir la domination du dollar dans les échanges internationaux.
Au forum financier de Shanghai, le gouverneur de la Banque populaire de Chine, Pan Gongsheng, a évoqué la vision d’un système monétaire multipolaire, moins dépendant des circuits traditionnels dominés par l’Occident. En parallèle, le système CIPS (Cross-Border Interbank Payment System), alternative au SWIFT occidental, continue de s’étendre.
Dans ce contexte, le yuan numérique devient un outil géopolitique à part entière. Plus rapide, moins cher, moins exposé aux sanctions : la monnaie chinoise cherche à séduire les économies émergentes tout en contournant les outils de contrôle américains.