Face à une explosion du trafic de méthamphétamine, les élus polynésiens votent une résolution ferme et unanime pour placer la lutte contre l’ice au cœur des priorités de l’État.
Une résolution unanime face à une urgence territoriale
Réunie en séance administrative le 3 juillet sous la présidence d’Antony Geros, l’Assemblée de la Polynésie française a adopté à une large majorité – 38 voix pour, 3 contre – une résolution de portée stratégique.
En ligne de mire : l’aggravation fulgurante du trafic et de la consommation de méthamphétamine, plus connue localement sous le nom d’« ice », qui ravage la société polynésienne. Santé publique, sécurité, cohésion sociale : les conséquences s’accumulent et frappent de plein fouet les plus vulnérables, notamment les jeunes.
Alors que les institutions judiciaires sont saturées et que les moyens de prise en charge sont insuffisants, cette résolution appelle à une mobilisation de tous les niveaux de l’État – local, national, régional, international – pour enrayer la prolifération des drogues synthétiques. Il s’agit, selon l’Assemblée, d’une priorité territoriale majeure, à ériger au rang de Grande cause nationale en 2026.
Renforcer la répression, la prévention… et les moyens
Le texte voté ébauche une feuille de route complète. Il demande un renforcement du cadre répressif à l’égard des trafiquants d’ice, notamment par l’introduction de la réclusion criminelle à perpétuité pour les cas les plus graves. Une mesure controversée, rejetée par une partie des élus, mais largement plébiscitée par le reste de l’hémicycle.
L’amendement porté par Tematai Le Gayic, qui proposait de retirer cette mention, a été rejeté à 47 voix contre 9.
Au-delà de la sanction, les élus polynésiens insistent sur la prévention, l’accompagnement des victimes et la réinsertion. Ils appellent l’État à garantir un soutien budgétaire accru : renforcement des effectifs de police et de justice, aides aux communes et aux associations de terrain, développement de parcours de soins adaptés.
L’assemblée réclame également une adaptation locale des outils de protection des témoins, des familles et des lanceurs d’alerte, à l’image de la loi sur le narcotrafic adoptée en métropole en avril dernier.
Une mobilisation à l’échelle régionale et un message politique clair
Dans un contexte de criminalité transfrontalière, l’Assemblée souhaite aussi intensifier les coopérations régionales dans le Pacifique, face à des réseaux toujours plus structurés. En 2024, les affaires liées à l’ice ont augmenté de 28 % à Papeete.
Les élus dénoncent l’implication croissante de mineurs, la déscolarisation, la prostitution et les fractures sociales alimentées par le trafic.
Le message envoyé à l’État est clair : cesser de minimiser l’impact local de l’ice. La ministre Nahema Temarii a d’ailleurs dénoncé la posture du haut-commissaire, jugée trop relativiste. Elle appelle à un contrôle plus rigoureux des flux entrants, dans une Polynésie sous la menace croissante du fentanyl.
Avec cette résolution, la Polynésie veut forcer la République à ouvrir les yeux sur un fléau trop longtemps cantonné à la périphérie. L’enjeu dépasse les frontières insulaires : il interroge la capacité de l’État à répondre à une crise sanitaire et sociale inédite dans l’outre-mer.