A la suite du 14 Juillet, Emmanuel Macron a lancé un signal fort : l’heure n’est plus à la paix des illusions. L’armée française doit se préparer au pire.
Une France sous pression dans un monde en décomposition
Dans les jardins feutrés de l’Hôtel de Brienne, le ton est tombé comme une alerte rouge. Emmanuel Macron n’a pas pris de détour : la liberté française est à son plus haut niveau de menace depuis 1945. Ce qu’il décrit comme un « moment de bascule » n’a rien d’une figure de style : c’est un changement d’ère. L’invasion de l’Ukraine par la Russie, les incertitudes transatlantiques, les menaces hybrides… la carte du monde a pris une teinte plus sombre.
La menace russe devient centrale. Elle est « préparée, organisée, durable » selon la Revue nationale stratégique. Moscou multiplie les provocations : cyberattaques, désinformation, sabotage, espionnage, intimidations nucléaires, sur fond d’un budget militaire russe désormais équivalent à 40 % de ses dépenses nationales. Le Kremlin veut 300 000 soldats supplémentaires d’ici 2030, et une capacité de frappe massive face à une Europe jugée vulnérable.
Macron l’assume : la France doit redevenir puissante pour rester libre. Pour être crainte, il faut montrer les muscles. La fin des « dividendes de la paix » exige un sursaut national.
Un effort budgétaire « historique », mais une équation périlleuse
C’est l’annonce choc du discours : le budget des Armées atteindra 64 milliards d’euros ( 7 680 milliards de Francs CFP) en 2027, soit le double de celui de 2017. Initialement prévue pour 2030, cette trajectoire est accélérée. Macron veut + 3,5 milliards d’euros ( 420 milliards de Francs CFP) en 2026, puis + 3 milliards d’euros ( 360 milliards de Francs CFP) en 2027. Objectif : combler les fragilités : munitions, drones, guerre électromagnétique, capacités spatiales, aviation de chasse.
Mais cet effort ne se fera pas à crédit. Le chef de l’État l’a martelé : pas d’endettement pour le réarmement. Il faudra « plus d’activité, plus de production ». Les entreprises sont appelées au patriotisme économique, les Français à un effort collectif. Sans hausse massive des impôts, cette équation relève du casse-tête. L’hypothèse implicite : réarmer sans ruiner la croissance.
Et Macron prévient : les votes budgétaires seront cruciaux. À l’automne, une actualisation de la loi de programmation militaire sera soumise au Parlement. Il appelle les députés à éviter les censures automnatiques qui retardent les budgets. L’armée n’attendra pas que les majorités se forment.
Un projet de résilience militaire et nationale à long terme
Mais au-delà des chiffres, Macron trace une feuille de route de reconquête stratégique. La Revue nationale stratégique actualisée en dresse le cadre : 11 objectifs, un pilier européen au sein de l’OTAN, une capacité de réaction autonome, et un service militaire volontaire rénové pour constituer une réserve nationale mobilisable.
Le président n’écarte plus l’idée d’une guerre de haute intensité impliquant directement la France à l’horizon 2030. Ce n’est plus une menace lointaine. C’est un scénario plausible, posé noir sur blanc par le Secrétariat général à la défense. Notre territoire pourrait être visé par des attaques hybrides massives, synchronisées avec un front européen. Une perspective qui change radicalement la doctrine de défense.
La dissuasion nucléaire reste le pilier, mais Macron appelle à un réarmement conventionnel crédible. La liste des capacités à renforcer est exhaustive : guerre électronique, défense anti-drones, feux dans la profondeur, aviation de transport, contrôle maritime… Presque tout est à reconstruire.
Côté jeunesse, les annonces sur le Service national universel et les réserves sont repoussées à l’automne. Mais l’ambition est claire : mobiliser une nouvelle génération pour une défense de la Nation à 360 degrés.
Ce discours n’est pas qu’un exercice de style présidentiel. C’est une déclaration d’urgence. Une rupture stratégique. Macron ne prépare pas la guerre, il se prépare à l’éventualité de ne pas pouvoir l’éviter. À deux ans de la fin de son mandat, et avec une majorité relative, il engage la France sur une trajectoire budgétaire, industrielle et géopolitique lourde de conséquences. Si le Parlement suit, la France pourrait redevenir une puissance militaire centrale en Europe. Si le sursaut n’a pas lieu, le déclin stratégique pourrait s’accélérer.