La Caisse locale de retraites annonce un avenir sombre aux fonctionnaires retraités.
Malgré un solde positif en 2025, les pensions continueront de baisser. Les retraités sont vent debout.
Une coupe injuste malgré un régime temporairement excédentaire
Le 10 juillet dernier, le syndicat des retraités territoriaux, affilié à la Cogetra, a tiré la sonnette d’alarme. Alors que la Caisse locale de retraites (CLR) devrait afficher un excédent de 440 millions de francs CFP cette année, les retraités apprennent qu’ils verront leurs pensions à nouveau minorées. Dominique Frontier, président du syndicat, dénonce un « scandale du siècle » : après une minoration de 9 % en 2024, une nouvelle baisse de 8 % est annoncée pour 2026… sans limite de durée.
Pour le syndicat des retraités, 2025 est un miracle budgétaire, mais malgré cela, selon les mots de son président, « on les punit ». En cause : une gestion à court terme, où l’injection ponctuelle de 2,7 milliards de francs par l’État, la stagnation des départs à la retraite (passés de 250 à 165) et une hausse des cotisations salariales de 1 % ont momentanément équilibré les comptes.
Mais la mesure de minoration est maintenue et risque de s’installer durablement, selon les orientations discutées par le comité d’orientation et de pilotage (COP) de la CLR. Le couperet pourrait s’abattre sans concertation, la décision devant être soumise au conseil d’administration fin août, puis aux élus du Congrès.
Une gouvernance défaillante, des cotisations impayées en cause
Ce désaveu s’inscrit dans un contexte de gouvernance fragilisée. Depuis sa création en 1954, puis sa transformation en CLR en 2006, le régime de retraite par répartition fait face à une érosion structurelle : seulement deux actifs pour un retraité aujourd’hui, contre huit en 1986.
Le conseil d’administration paritaire est régulièrement pointé du doigt pour son manque d’assiduité. La Chambre territoriale des comptes a souligné que la plupart des administrateurs représentant les employeurs publics – désormais garants du régime depuis 2014 – brillent par leur absence. Sans expertise fiable ni contrôle interne renforcé, les décisions prises sont jugées peu fondées.
Pire : 1,9 milliard de francs de cotisations impayées restent à recouvrer. L’équivalent d’un mois de pension pour les 6 000 retraités concernés. Pour le syndicat, « si les élus ne réagissent pas, la CLR est condamnée ». Il demande en urgence deux mesures : interdire les départs avant 60 ans et relever l’âge légal à 62 ans. Près de 1 400 agents seraient prêts à partir à la retraite dans les mois à venir.
Des réformes en cascade, mais un avenir toujours incertain
Pour ralentir l’effondrement, des mesures d’urgence ont été votées dès 2023 : hausse progressive des cotisations (de 35 % à 39,5 %), arrêt des bonifications, allongement de la période de calcul des pensions, durée de cotisation portée de 30 à 35 ans d’ici 2033. Ces réformes ont permis de repousser l’échéance de cessation de paiement à novembre 2024.
Mais elles ne suffisent plus. Un nouveau plan de rigueur est sur la table :
Minoration temporaire des pensions portée à 9 % d’août 2024 à décembre 2025
Réduction du délai d’absence autorisé hors territoire de 183 à 91 jours, sous peine de désindexation
Versement des pensions conditionné à la trésorerie disponible, avec risque de retards
Face à cela, le gouvernement local a sollicité une avance de 630 millions de francs sur les 12 milliards prêtés par l’État, pour éviter la faillite immédiate.
La Chambre territoriale des comptes préconise la création d’un service permanent d’expertise financière, capable de fiabiliser les projections et d’orienter les réformes. Car, à défaut de mesures structurelles profondes, la CLR s’expose à une rupture brutale de trésorerie et à une perte de confiance irréversible.
Le régime de retraite des fonctionnaires calédoniens est à bout de souffle. Malgré les efforts engagés depuis 2023, la stratégie d’urgence se heurte à un mur démographique, à une gouvernance en déroute et à l’absence chronique d’expertise indépendante. Le sursis budgétaire obtenu cette année ne doit pas masquer la réalité : la faillite technique guette la CLR. Et avec elle, la dignité des retraités calédoniens.