La menace est silencieuse, mais bien réelle. Chaque jour, les enfants sont exposés à des dangers numériques que beaucoup de parents sous-estiment encore.
Une offensive policière discrète mais décisive dans les écoles
Depuis plusieurs mois, la Police nationale en Nouvelle-Calédonie déploie un dispositif renforcé dans les écoles de Nouméa. Objectif : éduquer les plus jeunes aux bons réflexes numériques et les prémunir contre les pièges d’Internet. Trois interventions par jour sont désormais assurées par les Correspondants Police Sécurité de l’École (CPSE), au cœur même des classes de CM1 et CM2.
Sites malveillants, cyberharcèlement, piratage de comptes, exposition sur les réseaux sociaux… Tous les sujets sont abordés sans tabou. Le but ? Briser le silence, éveiller les consciences et rendre les enfants acteurs de leur propre cybersécurité. Une mission jugée essentielle alors que l’âge moyen du premier téléphone tourne autour de 9 ans et 9 mois.
Au-delà des discours, les policiers misent sur des échanges concrets et adaptés à l’âge des élèves, dans une logique de prévention et non de répression. Car le danger numérique commence dès le plus jeune âge, souvent sans que les parents ne s’en aperçoivent.
Parents débordés, enfants surexposés : un fossé numérique qui s’agrandit
Selon une étude Ipsos, 58 % des parents affirment « faire comme ils le sentent » pour accompagner leurs enfants face aux écrans. Résultat : des usages anarchiques et un terrain fertile pour les dérives. Les 11–15 ans passent en moyenne trois heures par jour devant un écran le week-end, exposés à une multitude de contenus parfois choquants.
Plus de 65 % des enfants de moins de 15 ans ont déjà vu de la pornographie, volontairement ou non. Une réalité glaçante, qui rappelle l’urgence de mieux encadrer les usages numériques à la maison. Mais face à cette explosion des écrans – en moyenne 5,7 par foyer – beaucoup de parents se disent dépassés.
C’est là qu’interviennent des outils comme le Cyber Guide Famille, élaboré par Cybermalveillance.gouv.fr : un manuel simple et pédagogique pour accompagner les gestes du quotidien. Création de profils enfants, contrôle parental, désactivation de la géolocalisation, autant de boucliers numériques à la portée de tous.
Mais la clé reste le dialogue, même avec les ados. Pas question de fliquer ou d’interdire, mais de poser des repères clairs : pas d’écrans à table, ni dans la chambre avant de dormir, discussions sur les publications en ligne, etc.
Jeux, réseaux sociaux, vidéos : l’apprentissage du numérique doit être guidé
Les jeunes ne naissent pas experts du numérique. Ils en sont les premiers consommateurs, mais rarement les utilisateurs avertis. Une bande dessinée, un quiz ou un kit de jeu peuvent suffire à transformer la sensibilisation en jeu d’apprentissage. Le projet « 1, 3, 3 CYBER ! » en est un bon exemple : il apprend aux enfants à détecter une arnaque, protéger un mot de passe ou reconnaître un faux lien.
Sur TikTok, Instagram ou Snapchat, des modes « restreints » et « connexion famille » permettent aussi d’éviter les pires contenus. Mais là encore, rien ne remplace l’échange entre parents et enfants, surtout à l’adolescence.
D’autant que la prévention passe aussi par l’exemplarité des adultes : un téléphone posé à table, c’est un signal clair. Un parent qui coupe les écrans avant de dormir, c’est un modèle. Des règles simples, mais essentielles.
Et lorsque le lien familial est solide, l’enfant lui-même devient capable de dire non, de signaler un contenu choquant, ou de ne pas répondre à un inconnu. Loin de diaboliser les écrans, il s’agit donc d’en faire des alliés du développement – à condition d’apprendre à les apprivoiser.
En Nouvelle-Calédonie comme ailleurs, les écrans sont devenus le premier terrain d’éducation citoyenne. La mobilisation des policiers dans les écoles est un signal fort : protéger les enfants commence désormais aussi sur Internet. Mais ce combat ne se gagne pas en solo. À l’école comme à la maison, la vigilance, le dialogue et quelques outils bien choisis peuvent faire toute la différence. Internet ne doit plus être un danger sournois, mais un espace maîtrisé et enrichissant.