Les États-Unis veulent envoyer des migrants en situation irrégulière vers Palau, petit État du Pacifique sous forte pression diplomatique.
Washington veut externaliser ses expulsions migratoires vers Palau
Les États-Unis intensifient leur stratégie migratoire en visant un nouvel allié du Pacifique. Selon un projet d’accord révélé par The Guardian, l’administration Trump a demandé à Palau, micro-État de 18 000 habitants, d’accueillir sur son sol des migrants « tiers » refoulés des États-Unis, c’est-à-dire des personnes venues de pays tiers et ayant demandé l’asile en Amérique.
Le texte, encore à l’état de brouillon, ne précise ni le nombre de migrants concernés ni la nature des contreparties offertes à Palau. Il stipule néanmoins que les mineurs non accompagnés ne seraient pas concernés, et que Palau resterait libre de refuser certains profils.
Cette manœuvre s’inscrit dans une logique plus large : la Cour suprême américaine a validé en juin l’exportation de demandeurs d’asile vers des pays tiers. Des transferts ont déjà eu lieu vers le Soudan du Sud ou l’Eswatini. Palau serait donc le prochain sur la liste.
Un « partenaire » sous pression financière et diplomatique
Palau est fortement dépendant de l’aide américaine dans le cadre du Compact of Free Association (COFA). Ce traité bilatéral garantit des aides financières conséquentes (près de 30 % du budget national en 2023), en échange d’une coopération militaire et diplomatique.
Une réunion de crise a été organisée sur l’île par le président Surangel Whipps Jr. avec le Congrès national et le Conseil des chefs. Le communiqué officiel reste prudent : les autorités locales demandent plus d’informations avant toute décision.
Mais pour plusieurs analystes, la pression est réelle. La chercheuse Camilla Pohle, licenciée après les coupes budgétaires opérées par Trump dans les programmes pacifiques, prévient :
« Il n’y a aucun bénéfice tangible pour Palau. Ce serait un accord signé sous la contrainte, avec la menace implicite de perdre l’aide américaine. »
Un coup dur pour l’image des États-Unis dans le Pacifique
Palau n’est pas signataire de la Convention de l’ONU sur les réfugiés, et ne dispose donc pas du même cadre légal pour accueillir les personnes persécutées. L’accord évoque une application basée sur la Constitution locale, sans garantie claire de droits humains.
Au-delà de l’aspect humanitaire, cette politique alimente un désengagement stratégique américain dans la région. Après le retrait des engagements climatiques – pourtant cruciaux pour les pays insulaires – la demande faite à Palau pourrait affaiblir la position américaine face à l’influence croissante de la Chine.
Comme le résume Camilla Pohle :
« La Chine n’aura aucun mal à exploiter cette faille. Les États-Unis imposent leur volonté sans contrepartie. Cela fragilise toute leur stratégie régionale. »