Kuala Lumpur s’est embrasée. Des milliers de citoyens ont défilé contre le gouvernement d’Anwar Ibrahim, jugé impuissant face à la flambée des prix et aux réformes attendues.
Une contestation populaire d’une ampleur inédite
Entre 20 000 et 50 000 Malaisiens ont envahi samedi la place de l’Indépendance, en plein centre de Kuala Lumpur, pour crier leur ras-le-bol. Le mot d’ordre était clair : « Démissionne, Anwar ». Sous une surveillance policière étroite, les manifestants ont fait entendre leur voix dans une atmosphère tendue, mais déterminée.
Cette manifestation, la plus massive depuis l’arrivée au pouvoir d’Anwar Ibrahim en 2022, a été organisée par plusieurs partis d’opposition. Pour beaucoup de citoyens, l’heure est au désenchantement.
En ligne de mire : la vie chère, les promesses non tenues, mais aussi les voyages diplomatiques du Premier ministre jugés déconnectés des réalités.
Même l’ancien mentor d’Anwar, Mahathir Mohamad, désormais son farouche adversaire, a pris la parole devant la foule :
Il se réjouit de nous voir souffrir.
Ce coup de semonce politique vient bousculer la stabilité fragile de la sixième économie d’Asie du Sud-Est, alors que les élections générales approchent à grands pas.
Des promesses de réformes… toujours en attente
Anwar Ibrahim avait pourtant suscité l’espoir. En 2022, à son arrivée au pouvoir, il avait promis monts et merveilles : lutte contre la corruption, fin du népotisme, refonte du système politique. Trois ans plus tard, ces promesses restent lettre morte. Les réformes structurelles se font attendre, pendant que l’inflation mine le quotidien.
Face à la colère, le chef du gouvernement a tenté une manœuvre d’apaisement en annonçant, quelques jours avant la mobilisation, le versement d’une aide de 100 ringgits (20 euros) à chaque adulte dès fin août, ainsi qu’une baisse ciblée du prix du carburant pour 18 millions de citoyens. Mais pour beaucoup, ces mesures tombent trop tard, et sont jugées trop faibles.
Les analystes voient dans cette annonce une tentative désespérée de freiner la mobilisation, sans grand succès. À Kuala Lumpur comme ailleurs, l’agacement est palpable. La fracture entre les promesses et la réalité semble désormais trop grande.
Une popularité en chute libre à l’approche de 2028
Il y a encore quelques mois, Anwar Ibrahim jouissait d’une popularité confortable, flirtant avec les 70 % d’opinions favorables. Mais selon un récent sondage du centre Merdeka, ce soutien a fondu à 55 %. Le désenchantement est réel, la rue a fini par le rappeler avec force.
Les pancartes brandies samedi n’étaient pas ambiguës. « Démissionne, Anwar », scandaient les manifestants. Certains estiment que le Premier ministre n’a pas pris la mesure de la crise sociale qui traverse le pays. Malgré des investissements annoncés à l’étranger – notamment en Russie – les retombées concrètes pour la population tardent à se faire sentir.
Cette démonstration de force arrive à un moment critique. Les partis politiques entrent déjà en ordre de bataille pour les prochaines élections, prévues au plus tard en février 2028. Et si Anwar Ibrahim ne redresse pas rapidement la barre, il risque fort de ne pas franchir le cap.
La Malaisie retient son souffle. Trois ans après son arrivée triomphale, le chef du gouvernement est désormais sous pression populaire. Le signal envoyé par la rue est clair : il est temps de passer des promesses aux actes. Sinon, l’avenir politique d’Anwar Ibrahim pourrait s’assombrir bien avant 2028.