Le gouvernement serre la vis. En Nouvelle-Calédonie, le dispositif « continuité pays », permettant aux habitants des îles de se déplacer à moindre coût vers la Grande Terre, est profondément révisé. Moins de trajets, plus de contrôles et une facture allégée pour la collectivité.
Un dispositif généreux devenu incontrôlable
Créé en 2012 pour faciliter les déplacements des résidents des îles Loyauté, de l’île des Pins et de Belep vers Nouméa, le dispositif « continuité pays » s’est peu à peu transformé en gouffre budgétaire. Financé à 75 % par l’ADANC grâce à la TGC (Taxe générale à la consommation) et initialement cofinancé par les provinces, le dispositif n’a cessé d’enfler. En 2023, 33 000 personnes ont bénéficié de la carte de transport… alors que le dernier recensement ne comptabilisait que 21 257 habitants permanents dans les îles.
Une situation aberrante que le président du gouvernement, Alcide Ponga, ainsi que l’ensemble des élus du boulevard Vauban ne veulent plus tolérer, même s’il y a eu débat sur les questions de résidences principales, de résidences secondaires et de déclarations fiscales. La réforme, adoptée à l’unanimité ce 29 juillet, vise donc à recadrer le dispositif pour qu’il réponde uniquement à sa vocation première : assurer l’accès aux services essentiels concentrés à Nouméa.
Moins de voyages, plus de justificatifs
La mesure phare ? La baisse drastique du nombre de trajets subventionnés : on passe de 10 allers simples en avion et 16 en bateau à seulement 4 allers en avion et 5 en bateau par an.
En parallèle, le dispositif sera désormais strictement réservé aux habitants permanents des îles. Le gouvernement met fin aux abus liés aux résidences secondaires et aux séjours occasionnels. Un renforcement du contrôle documentaire est instauré : justificatifs de domicile, attestations de travail local, carte AMG (Aide médicale gratuite) ou preuve d’inscription scolaire pour les enfants des îles scolarisés à Nouméa.
Les ayants droit (enfants, conjoints, étudiants, retraités) devront, eux aussi, fournir des preuves de lien familial et de résidence durable pour espérer conserver leur carte de transport. Le tout dans un souci d’équité et de bonne gestion des finances publiques.
Un coût allégé et un recentrage assumé
Jusqu’ici, le dispositif coûtait jusqu’à 720 millions de francs CFP par an à la collectivité. Avec ce recentrage, le gouvernement espère ramener le nombre de bénéficiaires à environ 25 000, soit une population réellement domiciliée dans les îles. De quoi réduire sensiblement la facture annuelle, tout en maintenant l’accès vital aux soins, à l’éducation et aux démarches administratives pour ceux qui en ont réellement besoin.
Les nouveaux tarifs, désormais fixés par arrêté, s’échelonnent de 6 000 F en avion pour les Loyauté à 3 000 F en bateau pour Belep, selon les liaisons. Les aides au fret sont, elles, supprimées. La gestion du dispositif est transférée à l’ADANC et à la direction des affaires maritimes, en remplacement d’Air Calédonie.
Un compromis a été trouvé après des débats nourris entre indépendantistes et non-indépendantistes, tous soucieux de préserver l’équilibre budgétaire sans sacrifier la solidarité territoriale. Une prochaine loi du pays, intégrant des critères de revenus, est déjà envisagée pour fin 2025, afin de rendre ce dispositif encore plus ciblé et juste.
En réformant la « continuité pays », le gouvernement calédonien assume un virage budgétaire et social majeur. Moins de billets, mais plus de justice dans l’accès aux aides : une ligne claire, dans un contexte où chaque franc compte.