Entre incivilités quotidiennes, fiscalité étouffante, et perte de repères collectifs, les auditeurs dressent un portrait sans fard d’une société calédonienne fracturée. Aucun tabou, aucune langue de bois : seulement la vérité brute de celles et ceux qui vivent les dérives, chaque jour. Revue thématique d’une colère ordinaire.
Délinquance banalisée, violence normalisée
La spirale est connue, mais désormais, elle ne choque même plus.
On vit dans un quartier tranquille… enfin, tranquille il y a cinq ans
lâche un auditeur visiblement usé.
Cambriolages, caillassages, vols dans les voitures : la routine
ironise un autre. Le plus grave ? Le sentiment d’impunité généralisée.
Même les gendarmes te disent que ça ne sert à rien de porter plainte
accuse un auditeur de Dumbéa. Difficile de garder espoir dans un système où
Les voyous ont plus de droits que les victimes
dit une auditrice, la voix tremblante. Et quand la police intervient, c’est parfois trop tard.
C’est au bout de la quatrième plainte qu’ils sont venus
relate un homme installé à Nouméa Nord. Le décrochage entre la population et les institutions de sécurité semble désormais acté.
Impuissance des autorités, absence d’État
Au fil des interventions, un constat revient en boucle : le désengagement complet des autorités.
Quand vous appelez untel, on vous renvoie à untel, qui vous renvoie à untel, qui vous renvoie à rien
ironise un auditeur excédé. Le jeu de la patate chaude institutionnelle laisse les Calédoniens seuls face à la crise. Un autre résume crûment :
Y’a plus d’État, juste des bureaux vides.
Et dans cette vacance, chacun tente de se débrouiller.
On a dû installer des caméras, des grilles, et même un chien. Mais même ça, ça n’arrête pas les petits
se désole une habitante de Rivière-Salée. L’autodéfense, le repli communautaire, la méfiance sont devenus la norme.
La fiscalité : dernière goutte d’un vase plein
Comme souvent, la fiscalité vient cristalliser l’écœurement.
On paie pour un service public qui ne sert plus à rien.
Cette phrase a fait réagir, tant elle résonne dans une Calédonie exsangue. La CCS, les impôts fonciers, la TGC… tout y passe. Un auditeur résume :
On nous tond comme des moutons, mais on n’a même plus de laine
Perte de repères et absence de vivre-ensemble
On vit les uns à côté des autres, pas ensemble.
Cette phrase, lâchée comme un aveu d’échec collectif, illustre le climat ambiant. La défiance s’installe entre voisins, entre communautés, entre générations. Un auditeur interpelle :
Les jeunes sont livrés à eux-mêmes, les vieux sont abandonnés, et le reste bosse pour survivre. Où est le projet commun ?
La réponse, personne ne la donne. Parce qu’elle semble avoir disparu. Le vivre-ensemble calédonien est en coma profond.
L’administration : lenteur, blocage, surdité
Enfin, l’exaspération administrative revient comme un leitmotiv.
J’ai demandé un papier à la CAFAT, ils m’ont donné rendez-vous dans un mois… pour me dire qu’il manque un papier.
Une autre explique qu’il faut trois mois pour un permis, mais six heures pour un PV. Les exemples pleuvent. Et la conclusion est implacable :
L’administration ne sert plus les gens, elle les étouffe
Un cri qui ne doit plus rester sans réponse
Une alerte rouge, sociale, politique, humaine. Il ne s’agit plus de simples doléances mais d’un signal d’effondrement de la confiance dans l’État, dans les institutions, et dans le modèle calédonien lui-même.
Si ce cri populaire continue d’être ignoré, le désengagement citoyen deviendra irréversible. Qui reprendra la main ? Qui restaurera la parole ? Il est temps de choisir : écouter et agir, ou continuer de nier jusqu’à l’implosion.