Dix mois après les violences de mai 2024, le constat est sans appel. La Nouvelle-Calédonie n’attire plus : le début d’année 2025 marque un effondrement historique du tourisme, révélant l’ampleur d’une crise qui fragilise l’économie et l’image du territoire. L’Isee-NC dresse un premier bilan du premier trimestre 2025 particulièrement alarmant.
Un effondrement sans précédent depuis trente ans
Au 1er trimestre 2025, seulement 9 670 touristes ont foulé le sol calédonien. Cela représente une baisse de 16 100 visiteurs par rapport à 2024, soit une chute vertigineuse de 62 %. Hormis la parenthèse du Covid-19, jamais en trois décennies la fréquentation n’avait atteint un niveau aussi faible. L’année précédente, la Nouvelle-Calédonie signait pourtant l’un de ses meilleurs débuts de saison avec 25 770 touristes. Mais les émeutes de mai 2024 ont brisé cet élan, laissant une image de chaos qui pénalise encore le territoire.
La crise se lit dans les chiffres : la fréquentation du 1er trimestre 2025 ne représente que 38 % de celle observée un an plus tôt. Le contraste est brutal et souligne à quel point la confiance internationale n’est pas rétablie.
Une clientèle étrangère en fuite, un marché de survie métropolitain
Le détail par pays d’origine est éclairant. La clientèle japonaise s’effondre de 96,7 %, passant de 2 148 touristes à seulement 70. Les Néo-Zélandais reculent de 89,3 %, les Australiens de 78,4 %. Au total, la clientèle étrangère chute de 80 % entre 2024 et 2025, et ne représente plus que 25 % des arrivées, contre 47 % un an plus tôt.
Face à cette désertion, seuls deux marchés amortissent le choc : la métropole (4 314 visiteurs, soit 45 % du total) et Wallis-et-Futuna (1 751 visiteurs, 18 %). À eux seuls, ces flux représentent à eux seuls près des deux tiers du tourisme de séjour. Autrement dit, sans les liens familiaux et l’ancrage historique avec la France, la Nouvelle-Calédonie aurait sombré dans un isolement touristique quasi-total.
Le constat est clair : les touristes étrangers ont déserté, effrayés par l’instabilité. Les avertissements officiels des gouvernements australien et néo-zélandais déconseillant les voyages en Calédonie pèsent lourd dans la balance.
Croisières : une reprise timide mais fragile
Le secteur des croisières résiste un peu mieux, mais reste loin de son dynamisme passé. Après une interruption totale pendant six mois à la suite des exactions de mai 2024, l’activité n’a repris qu’en toute fin d’année. Au 1er trimestre 2025, 34 paquebots ont accosté, soit 7 de moins qu’en 2024. Ils ont transporté 102 970 croisiéristes, un recul de 15 % par rapport à l’an dernier.
Seule Lifou maintient son attractivité, avec 18 navires accueillis et 43 400 passagers. Mais là encore, la tendance reste fragile. Contrairement aux touristes aériens, les croisiéristes ne s’attardent pas et dépensent moins sur place. La croisière ne compense donc pas la débâcle du tourisme de séjour.
Au-delà des chiffres, c’est l’économie calédonienne qui encaisse le choc. Le tourisme, déjà modeste comparé aux grands pôles régionaux comme Fidji ou Tahiti, voit son poids réduit à peau de chagrin. Les hôtels, restaurants et prestataires d’activités sont les premières victimes. La confiance des investisseurs est entamée.
Cette situation met en lumière un enjeu politique majeur : la sécurité et la stabilité sont les conditions premières de l’attractivité. Les violences de 2024 ont laissé une cicatrice profonde, rappelant qu’aucune destination touristique ne prospère sans ordre rétabli et autorité respectée.
Si la Nouvelle-Calédonie veut retrouver sa place dans le Pacifique, elle doit miser sur ses atouts naturels et son lien indéfectible avec la France. Cela passe par la restauration de la sécurité, la promotion d’une image positive et le rejet de la victimisation permanente. Sans une ligne claire, l’archipel restera marginalisé, condamné à voir ses plages désertées et son économie fragilisée.