Les élus calédoniens ont tranché : le report des provinciales devient réalité pour permettre l’application de l’accord de Bougival.
Un vote décisif pour concrétiser l’accord de Bougival
Ce lundi 15 septembre 2025, le Congrès de la Nouvelle-Calédonie s’est réuni en séance extraordinaire. À l’ordre du jour, un seul point : donner un avis sur la proposition de loi organique visant à reporter le renouvellement du Congrès et des assemblées de province. Ce report, prévu au plus tard en juin 2026, doit permettre la mise en œuvre de l’accord de Bougival signé le 12 juillet 2025.
Sans surprise, l’avis a été adopté par 39 voix pour et 13 contre. Parmi les soutiens : les Loyalistes, le Rassemblement, Calédonie ensemble, l’Union nationale pour l’indépendance (UNI) et l’Éveil océanien. Face à eux, l’UC-FLNKS et les Nationalistes ont voté contre, préférant maintenir l’échéance électorale de novembre 2025.
En ouverture des débats, le secrétaire général du Haut-Commissariat, Stanislas Alfonsi, a rappelé que ce report constituait une condition essentielle pour mettre en œuvre l’accord politique trouvé à Paris. Selon lui, il s’agit d’un calendrier institutionnel nécessaire pour éviter les blocages et garantir la légitimité du processus.
Les interventions ont rappelé l’histoire institutionnelle : les accords de Matignon (1988), de Nouméa (1998), puis le processus des référendums. Mais cette fois, c’est Bougival qui occupe le centre de la scène. Le report des élections est le premier test de cet accord que l’État, les loyalistes et une partie des indépendantistes veulent faire vivre.
Les loyalistes et Calédonie ensemble en soutien
Les Loyalistes, par la voix de Sonia Backès, ont assumé sans détour leur vote favorable. Pour la présidente de la province Sud, ce report est un acte de responsabilité. Elle a rappelé :
La confiance se gagne quand les paroles se tiennent.
Elle a également mis en garde contre le risque de laisser au Conseil constitutionnel la décision de trancher sur le corps électoral, un enjeu explosif pour la démocratie calédonienne.
Le Rassemblement, conduit par Virginie Ruffenach, a insisté sur le caractère stratégique de ce report.
C’est un choix décisif : laisser le chaos s’installer, ou prendre le temps nécessaire pour donner des perspectives à la Nouvelle-Calédonie, a-t-elle résumé.
Pour ce camp, il ne s’agit pas d’une manœuvre politicienne, mais bien de préparer un avenir stable, ancré dans la République française.
Calédonie ensemble, par la voix de Philippe Gomès, a également apporté son soutien, tout en appelant à enrichir l’accord. Pour lui, il faut éviter que Bougival ne connaisse le même sort funeste que que celui qu’ont connu d’autres textes enterrés par les crises passées. Son objectif : réintégrer le FLNKS dans le dialogue pour bâtir un compromis durable.
L’indépendantisme divisé, entre ouverture et blocage
Face à cette majorité, l’opposition indépendantiste ne s’est pas exprimée d’une seule voix. L’Union nationale pour l’indépendance (UNI), représentée par Jean-Pierre Djaïwé, a voté pour le report. Pour lui, ce délai est l’occasion de travailler encore l’accord, de l’expliquer et de l’améliorer.
L’objectif, c’est de faire en sorte que cet accord de Bougival soit accepté, a-t-il déclaré.
En revanche, l’UC-FLNKS et les Nationalistes ont rejeté la proposition. Pierre-Chanel Tutugoro a dénoncé une remise en cause de la périodicité électorale et risquerait de transformer une mesure exceptionnelle en un outil de contournement de la volonté populaire.
L’Éveil océanien, par la voix de Milakulo Tukumuli, a adopté une position pragmatique :
Nous sommes ouverts au report, mais il faut relancer rapidement les discussions entre partenaires politiques.
Pour ce mouvement, la priorité est de préserver un climat apaisé, loin des tensions permanentes qui paralysent le pays.
Au terme de ce débat, une certitude s’impose : la majorité des élus calédoniens a choisi de faire confiance à la République. Le Sénat doit désormais examiner cette proposition de loi organique avant qu’elle ne soit transmise à l’Assemblée nationale.
Pour les partisans de Bougival, ce report est bien plus qu’une mesure technique. Il incarne le premier acte concret de la mise en œuvre de l’accord, symbole d’une confiance retrouvée et d’un avenir à reconstruire. Loin de prolonger artificiellement des mandats, il s’agit de créer les conditions d’une stabilité politique indispensable.
En validant ce report, le Congrès a envoyé un message clair : la Nouvelle-Calédonie veut se donner du temps pour bâtir un projet solide. L’État, les loyalistes et une partie des indépendantistes ont choisi la responsabilité contre le chaos, la confiance plutôt que la défiance.
L’accord de Bougival ouvre désormais un horizon nouveau. Mais son succès dépendra d’une condition : que chaque acteur, fidèle à sa parole, fasse primer l’intérêt du peuple calédonien et de son ancrage républicain sur les calculs politiciens.