Sous la pression, Anne Hidalgo a sorti l’arme de la transparence totale. Mais son opération vérité pourrait bien se retourner contre elle.
Une riposte sous pression médiatique
Accusée de dépenses somptuaires, notamment 75 000 euros de frais vestimentaires et de représentation en quatre ans, Anne Hidalgo a tenté la contre-attaque. La maire socialiste de Paris, critiquée par Mediapart puis contrainte de s’expliquer devant les médias, a décidé d’ouvrir les dossiers sensibles. Jeudi 2 octobre, elle a donc publié un état des lieux détaillé des indemnités et frais de représentation de ses élus, incluant les maires d’arrondissement.
Cette initiative, présentée comme un « exercice de transparence et de responsabilité », intervient alors que l’ombre des municipales de 2026 plane déjà sur la capitale. Mais loin de calmer la polémique, ce coup de communication soulève davantage de doutes sur la gestion d’une mairie au budget annuel de 11 milliards d’euros (1 320 milliards de francs CFP).
L’affaire prend d’autant plus d’ampleur que les révélations concernent des élus de tous bords. Des factures de repas luxueux, vêtements de marque, soins esthétiques, champagne et cadeaux protocolaires viennent écorner l’image d’une classe politique parisienne déjà accusée de vivre hors-sol.
Une classe politique parisienne coupée du réel
Si la maire socialiste est particulièrement visée, ses homologues ne sont pas épargnés. Le PS Éric Lejoindre, maire du XVIIIe et proche d’Hidalgo, est pointé du doigt pour des remboursements douteux. Du côté de la droite, Jean-Pierre Lecoq (LR, VIe) a fait rembourser 745 euros (89 400 francs CFP) de chaussures pendant ses vacances. Francis Szpiner (LR, XVIe) a justifié l’achat de lampes désodorisantes contre les odeurs de tabac au titre de ses frais de représentation.
À l’inverse, Rachida Dati, maire LR du VIIe, apparaît comme la plus économe : seulement trois repas remboursés en quatre ans. Un contraste saisissant qui souligne l’écart entre une gestion rigoureuse et une dépense publique débridée.
Les Parisiens découvrent ainsi un panorama édifiant : des menus enfant remboursés par Lejoindre, 35 000 euros (4,2 millions de francs CFP) de vêtements pour Jeanne d’Hauteserre (LR, VIIIe), vingt rendez-vous chez le coiffeur pour Florence Berthout (Horizons, Ve). Une litanie de dépenses qui accentue l’impression d’une élite parisienne en déconnexion totale avec le quotidien des contribuables.
Une bombe politique à six mois des municipales
L’opposition pointe une manœuvre politicienne de la maire de Paris, prise à son propre piège.
Le problème, c’est que cette polémique est concomitante avec la publication du rapport de la Chambre régionale des comptes, rappelle Geoffroy Boulard (LR, XVIIe), qui dénonce la mauvaise gestion globale de la capitale.
Anne Hidalgo, déjà affaiblie par son voyage polémique à Tahiti en 2023 et une image ternie par les échecs de sa campagne présidentielle, voit sa crédibilité encore plus fragilisée. À six mois des élections municipales, la polémique installe un climat délétère : défiance vis-à-vis des élus, colère des contribuables, soupçons généralisés de dérives.
Si le Parquet national financier confirme qu’aucune enquête n’est ouverte sur les notes de frais, la mairie reste sous tension. Le « déballage » orchestré par Hidalgo apparaît comme un pari risqué : vouloir montrer patte blanche, mais offrir à la presse et à l’opinion publique un inventaire à la Prévert des excès d’une élite municipale.
Au final, le malaise grandit. La droite parisienne dénonce une capitale mal gérée, la gauche se défend en accusant la diversion. Mais une chose est certaine : cette affaire cristallise un sentiment d’écœurement croissant des Parisiens vis-à-vis de leur classe politique, et pourrait bien peser lourd dans les urnes en 2026.