Deux mois ont suffi pour qu’un signataire devienne opposant. À l’Assemblée nationale, Emmanuel Tjibaou a interpellé la ministre des Outre-mer Naïma Moutchou sur le report des élections provinciales en Nouvelle-Calédonie, tout en remettant en cause l’accord qu’il avait signé en juillet à Bougival.
De Bougival à Paris : un virage à 180 degrés
En juillet 2025, Emmanuel Tjibaou appose sa signature sur l’accord de Bougival pour le compte du FLNKS – Mouvement de libération, saluant à l’époque une « base solide pour la paix ».
Deux mois plus tard, changement radical : le député s’érige en critique du texte, affirmant que les conditions de concertation « ne sont plus réunies ».
« Aujourd’hui, ce n’est plus le cas », a-t-il déclaré dans l’hémicycle, accusant le gouvernement de faire porter aux parlementaires la responsabilité du report des provinciales, initialement prévues en novembre 2025.
Le même élu qui signait l’accord censé ouvrir la voie à ce report dénonce désormais une manœuvre imposée par Paris.
Une contradiction qui illustre la fracture interne du FLNKS et la stratégie d’esquive adoptée par ses représentants.
La ministre renvoie Tjibaou à ses engagements
Face à lui, Naïma Moutchou a rappelé la ligne du gouvernement : le respect du dialogue et la continuité du processus de paix.
Elle a insisté sur le fait que le Parlement devait trancher, comme le prévoit la méthode historique en Nouvelle-Calédonie, tout en avertissant :
Ne pas voter cette proposition de loi ouvrirait la porte à une crise.
La ministre a reconnu que le FLNKS n’était plus à la table des discussions, tout en affirmant vouloir le ramener dans le processus, à condition qu’il accepte le dialogue avec les autres forces politiques.
Un message clair : on ne peut pas revendiquer la paix tout en refusant les outils pour la bâtir.
Le FLNKS face à ses contradictions
L’épisode révèle le double discours d’une partie du camp indépendantiste. D’un côté, ils demandent la poursuite des discussions au nom du consensus ; de l’autre, ils rejettent la loi qui permet de les prolonger.
L’accord de Bougival, signé après les émeutes de mai 2024, prévoit un report des élections provinciales au 28 juin 2026 pour permettre la mise en œuvre du nouveau cadre institutionnel. Refuser ce report, c’est bloquer le processus que le FLNKS disait vouloir construire.
Emmanuel Tjibaou incarne ce paradoxe : il revendique la paix, mais s’oppose au moyen de la garantir.
Un pied dedans, un pied dehors : la position la plus instable qui soit.