Ils étaient 30 000 face à des milliers d’envahisseurs. Le 25 octobre 732, la France naissait dans le fracas des épées.
Une invasion stoppée net au cœur de la Gaule
En 732, alors que les armées musulmanes progressent depuis l’Espagne et ravagent le sud de la Gaule, le destin du pays bascule. Abd al-Rahman, gouverneur d’Al-Andalus, marche vers Tours, attiré par les richesses du sanctuaire de saint Martin. Ce ne sont pas des conquérants religieux, mais des pillards avides d’or et de butin.
Face à cette menace, le duc d’Aquitaine Eudes appelle à l’aide les Francs, peuple rude et discipliné conduit par Charles Martel, fils illégitime d’un grand aristocrate, mais chef redouté.
Les deux armées se rejoignent près de Poitiers, à Moussais-la-Bataille, dans le froid d’un mois d’octobre qui deviendra légendaire. Les Francs dressent une ligne de fer : une muraille humaine, compacte, silencieuse, bardée de boucliers. En face, la cavalerie légère musulmane charge à répétition. Mais le « mur franc » ne cède pas. Abd al-Rahman tombe au combat. Ses troupes, découragées, fuient dans la nuit.
La Gaule est sauvée. L’Europe vient de naître.
Le marteau de Dieu : Charles Martel forge la France
Ce fils illégitime devenu chef de guerre sort grandi de Poitiers. On le surnomme bientôt « Martel », celui qui frappe comme un marteau. Il n’est pas roi, mais déjà, il agit en souverain. Après la victoire, il repousse les derniers foyers ennemis en Septimanie, saccage les bastions musulmans et impose l’autorité franque sur tout le royaume.
Par la force, il rétablit l’unité perdue de la Gaule depuis la mort de Dagobert Ier. Martel comprend que, pour régner, il faut une armée fidèle. Il distribue des terres à ses guerriers, posant ainsi les bases d’un nouvel ordre politique et social : celui de la future dynastie carolingienne. De lui naîtront Pépin le Bref, puis Charlemagne, fondateur de l’Europe chrétienne.
Cette bataille, pourtant modeste sur le plan militaire, devient une victoire symbolique et morale.
Dans une chronique espagnole du VIIIᵉ siècle, on parle pour la première fois d’une victoire des « Européens » contre les infidèles.
C’est ici, à Poitiers, qu’apparaît pour la première fois l’idée d’une Europe comme civilisation commune, unie dans la défense de sa foi et de sa liberté.
Poitiers, la mémoire d’une France debout
Pendant plus d’un millénaire, Poitiers reste gravée dans l’imaginaire national. Sous les rois, elle incarne la résistance chrétienne face à l’invasion étrangère. Sous la IIIᵉ République, elle devient un symbole d’unité nationale, le sursaut d’un peuple libre refusant la soumission.
Pour les historiens comme pour les patriotes, Charles Martel n’est pas seulement un chef de guerre : il est le bouclier de la France.
La victoire de 732 ne met pas totalement fin aux incursions musulmanes. Narbonne reste sous domination arabe jusqu’en 759. Mais le message est clair : aucune armée étrangère ne franchira impunément la Loire.
La Gaule franque, héritière de Rome et de la foi chrétienne, s’impose comme le cœur battant d’une Europe qui refuse la conquête.
Poitiers marque ainsi la naissance d’une conscience nationale.
En arrêtant l’avancée de l’islam vers le nord, Charles Martel forge l’âme d’un continent.
Une bataille, une victoire, une civilisation : le jour où la France a dit « non ».















