Si vous pensiez que le Japon resterait une destination bon marché, détrompez-vous.
Derrière la hausse annoncée des taxes touristiques, c’est toute une vision politique qui s’affirme : celle d’un pays souverain, exigeant et tourné vers la discipline budgétaire.
Le Japon tourne la page du tourisme low-cost
Le Japon a accueilli plus de 31 millions de visiteurs en 2025, un record historique qui fait grincer des dents. Pour le gouvernement mené par la conservatrice Sanae Takaichi, l’heure n’est plus à l’ouverture sans condition. L’explosion du tourisme a épuisé les infrastructures, saturé les transports et provoqué une flambée des loyers dans les grandes villes. Face à ce constat, Tokyo choisit la voie du réalisme économique : faire contribuer les visiteurs étrangers à la qualité de vie des Japonais.
Dès 2026, la taxe internationale de départ sera relevée. Actuellement fixée à 1 000 yens (5,50 €/660 francs CFP), elle devrait se rapprocher des normes européennes, soit jusqu’à 40 € (4 800 francs CFP) par passager. De même, les visas à entrée unique et multiple verront leurs tarifs grimper, une première depuis 1978.
Le message est clair : le Japon ne veut plus brader son attractivité. À l’image de l’Allemagne ou du Royaume-Uni, il revendique le droit de faire payer un tourisme exigeant pour garantir la qualité de ses infrastructures.
Mais la hausse des taxes ne vise pas uniquement à réguler les flux : les recettes financeront directement la gratuité de la scolarité secondaire et la modernisation des aéroports. Une approche qui mêle fermeté et responsabilité, sans alourdir la charge fiscale des contribuables nationaux.
Des touristes plus nombreux, mais aussi plus encadrés
Le gouvernement japonais ne cache plus sa volonté de reprendre la main sur son territoire. L’instauration prochaine du Japan Electronic System for Travel Authorisation (JESTA) en 2028, équivalent du système ETIAS européen, imposera une taxe supplémentaire d’environ 6 000 yens (36 €/4 320 francs CFP) aux voyageurs exemptés de visa.
Objectif : contrôle renforcé, sécurité accrue et gestion rationnelle des flux.
Cette mesure s’inscrit dans une stratégie plus large de souveraineté migratoire. Comme l’a souligné Takaichi, certains comportements de touristes étrangers, agressions d’animaux sacrés, incivilités, nuisances dans les temples, ont choqué l’opinion publique. L’idée n’est pas de fermer le pays, mais de rappeler que le respect du Japon se mérite.
Kyoto, symbole de cette transition, mettra en place dès 2026 une taxe d’hébergement progressive : jusqu’à 10 000 yens (56 €/6 720 francs CFP) par nuit dans les hôtels de luxe. Une première depuis 2018, qui devrait doubler les recettes fiscales de la ville. Les visiteurs modestes ne seront pas oubliés : un tarif minimal de 200 yens (1 €) s’appliquera aux séjours les plus économiques.
Là encore, le but n’est pas de décourager, mais d’impliquer : le Japon veut que chaque visiteur contribue à la préservation du patrimoine et à la propreté des villes.
Une politique assumée : rigueur, éducation et fierté nationale
Sous la houlette de Sanae Takaichi, première femme à diriger le Japon, le pays renoue avec une vision patriotique et conservatrice de la politique publique. La hausse des taxes touristiques n’est pas un simple ajustement budgétaire : c’est une affirmation de souveraineté.
L’idée que les étrangers participent au financement du modèle éducatif japonais séduit une opinion publique lassée de voir le pays saturé par un tourisme de masse souvent peu respectueux.
Depuis 1978, les frais de visa n’avaient jamais été révisés. Le Japon assume aujourd’hui une mise à niveau nécessaire : alors que l’Union européenne facture 90 € (10 800 francs CFP) pour un visa Schengen, Tokyo ne demandait que 19 € (2 280 francs CFP). Ce rééquilibrage, justifié par la compétitivité et le bon sens, permettra de mieux financer la formation, la sécurité et les infrastructures.
Certains observateurs étrangers y voient une forme de nationalisme fiscal. Les Japonais, eux, y lisent une exigence de justice : faire payer à chacun sa part, sans plomber le contribuable. Comme le résume un diplomate nippon :
Ce que le Japon protège, ce n’est pas son argent, c’est sa dignité.
En somme, le Japon ne ferme pas ses portes, il en redéfinit les conditions d’accès. L’ère du tourisme à bas coût touche à sa fin : place à une économie de la responsabilité, où le respect, la contribution et la qualité remplacent le laisser-faire.
Un signal fort envoyé à un monde où, trop souvent, l’accueil se confond avec la faiblesse.















