Une alliance militaire se renforce dans le Pacifique. Et cette fois, l’objectif n’est plus seulement l’aide humanitaire.
Une « force de stabilisation » en gestation
Les ministres de la Défense du Pacifique Sud veulent transformer le Pacific Response Group (PRG), initialement créé pour répondre aux catastrophes naturelles, en une véritable force de stabilisation régionale. L’annonce a été faite lors du South Pacific Defence Ministers’ Meeting (SPDMM) tenu au Chili.
Le projet prévoit d’élargir le mandat du PRG à des opérations de maintien de l’ordre et de sécurité, avec un cadre juridique commun. Un accord de statut des forces (SOFA) est aussi à l’étude pour permettre aux armées membres – Australie, France, Nouvelle-Zélande, Chili, Papouasie-Nouvelle-Guinée, Fidji et Tonga – de déployer leurs troupes plus librement sur les territoires alliés.
Cette initiative marque une évolution stratégique : il ne s’agit plus seulement de secourir, mais aussi de stabiliser.
Une riposte implicite à l’influence chinoise
Officiellement, personne n’a cité la Chine. Officieusement, tout le monde y pense.
Canberra et Wellington entendent préserver un “ordre fondé sur des règles” face à l’expansion chinoise dans la région.
Le ministre australien de la Défense, Richard Marles, a évoqué une « croissante compétition géostratégique » et insisté sur les valeurs démocratiques partagées entre les membres et les observateurs : Royaume-Uni, Japon et États-Unis.
Selon un responsable présent à la réunion, l’initiative vise clairement à empêcher les “pays autoritaires” d’étendre leur influence.
Des analystes comme Anna Powles estiment toutefois que le projet s’apparente à une forme de “refus stratégique” vis-à-vis de Pékin : une manière pour l’Australie de consolider son réseau de partenariats militaires tout en verrouillant le Pacifique face à la Chine.
Entre ambitions sécuritaires et scepticisme régional
Si les États membres du SPDMM soutiennent la démarche, certains voisins du Pacifique restent prudents. Les Îles Salomon, Kiribati ou Vanuatu, déjà proches de la Chine, pourraient y voir une provocation occidentale.
La chercheuse néo-zélandaise rappelle aussi que la France conserve une présence coloniale contestée en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française, ce qui alimente la méfiance.
Le défi sera donc de convaincre les États non membres que la PRG ne cherche pas à imposer un modèle occidental, mais à garantir la stabilité collective.
Pour Mike Hughes, de l’Australian Strategic Policy Institute, cette évolution marque un tournant : le PRG devient un outil de gestion de crise post-conflit, à l’image du traité Puk Puk entre l’Australie et la Papouasie. « C’est un message clair envoyé à la Chine », conclut-il.






















