J’ai essayé de suivre l’actualité du jour.
J’ai ouvert la radio. J’ai regretté.
Ça parlait de report d’élections, de dialogue obligatoire, de « dernière chance ». J’ai compris qu’on était encore dans le chapitre « On repousse, mais c’est la dernière fois. Promis. »
J’ai tenté de me concentrer.
J’ai entendu « 25 mois de report ». J’ai levé les yeux.
J’ai entendu « objectif d’intérêt général ». J’ai soupiré.
J’ai entendu « consensus ». J’ai ri intérieurement. Pas longtemps.
Le FLNKS a dit qu’il était ouvert au dialogue.
J’ai pensé que tout le monde était ouvert au dialogue.
J’ai cherché le dialogue.
J’ai trouvé des communiqués. Et des sous-entendus.
Du coup, j’ai rien dit.
J’ai entendu que le Palika ouvrait son 50ᵉ congrès.
J’ai imaginé 50 ans de débats, de stratégies, de phrases longues.
On parlait de Bougival, d’indépendance, de reconstruction, de calendrier.
J’ai essayé de comprendre le calendrier.
J’ai abandonné.
Ensuite, j’ai découvert que deux incendies s’étaient déclarés à Païta.
Un devant une boulangerie, un devant la police municipale.
J’ai pensé qu’on avait vraiment des façons étranges d’occuper ses nuits.
J’ai entendu « pas de gros dégâts ».
J’ai pensé que c’était déjà ça.
Puis on m’a parlé d’une école où deux types en moto auraient tiré des balles à gel pendant la pause.
J’ai cherché la blague.
J’ai trouvé des enfants traumatisés.
J’ai encore soupiré.
J’ai basculé sur l’économie.
Erreur.
Le Medef défendait la SLN comme un capitaine accroché à un gouvernail en plein naufrage.
On disait « acteur structurant », « emploi qualifié », « transition énergétique ».
J’ai compris qu’on prononçait « avenir », mais qu’on pensait « urgence ».
Après, on a parlé d’éducation à Houaïlou.
De territoire éducatif rural.
De classes qui changent de profs trop souvent.
De parents qui décrochent.
De distances qui découragent.
J’ai pensé que l’école devait déjà faire des miracles, alors réparer le reste…
J’ai pas fini ma phrase.
J’ai ensuite entendu parler du Women’s Forum.
200 personnes, des tables rondes, un Livre blanc.
J’ai trouvé ça inspirant.
J’ai pensé que ça durerait peut-être plus longtemps que les résolutions politiques.
J’ai failli être optimiste.
J’ai arrêté tout de suite.
Puis c’était la culture.
Les 150 ans d’une église.
Des jeunes qui préparent les JMJ.
Un festival de cinéma.
Le salon Prestige.
J’ai noté qu’au moins la culture, elle, ne reporte rien.
On a parlé solidarité aussi.
Les Petites Sœurs des Pauvres qui collectent des produits de première nécessité.
La Table de l’amitié du Téléthon.
800 personnes autour d’un pique-nique pour aider les autres.
J’ai trouvé ça beau.
J’ai rien dit, mais j’ai pensé très fort que c’était peut-être ça, la vraie cohésion.
Après, c’était la fête du sable, la fête du roi WaJuyu, des pirogues, des marchés, des danses, des nuits mélanésiennes.
J’ai compris que malgré tout, le pays continuait à vivre.
À danser.
À bricoler sa joie.
J’ai regardé l’heure.
J’ai réalisé que tout ça, c’était juste la journée.
Une seule.
Bref.















