Deux années de bouleversements économiques ont fait exploser le recours au e-commerce, saturant les plateformes logistiques du pays.
Face à cette réalité, la Nouvelle-Calédonie se devait enfin d’adapter ses règles douanières à un monde qui s’accélère.
LA NOUVELLE-CALÉDONIE FACE AU CHOC DU E-COMMERCE MONDIAL
Tandis que les nations avançaient, la Calédonie s’essoufflait sous un code des douanes devenu archaïque, hérité d’une époque où les colis internationaux n’affluaient pas par milliers. Aujourd’hui, ce sont plus de quatre milliards de marchandises qui circulent chaque année à travers le monde. Dans ce flux, les petits territoires insulaires subissent une pression logistique inédite.
Saisi par le gouvernement le 8 octobre 2025, le CESE-NC a dû répondre à une réalité : l’essor massif des envois express crée une congestion qui pénalise tout le monde, des familles aux entreprises locales. Les transitaires spécialisés les expressistes alertent depuis des années. Ils dénoncent une concurrence inéquitable : l’OPT bénéficie déjà d’un régime simplifié pour les envois postaux de faible valeur, tandis que le secteur privé se débat dans une paperasserie disproportionnée.
La réforme change profondément les règles du jeu : élargir la taxation simplifiée aux envois express. Une mesure de bon sens, attendue depuis longtemps, qui permettrait enfin de regrouper les 6 600 positions tarifaires internationales en seulement 52 catégories. Une révolution administrative.
Mais derrière l’aspect technique, l’enjeu est politique : remettre de l’ordre, protéger le consommateur et défendre une concurrence saine. Une ligne assumée par les rapporteurs du CESE-NC, qui rejoint une évidence trop longtemps ignorée : la Nouvelle-Calédonie doit cesser de subir et reprendre le contrôle.
UN TEXTE À REVOIR : RÉDUIRE LES AMBIGUÏTÉS, RENFORCER LA SÉCURITÉ JURIDIQUE
Le cœur de l’avis du CESE-NC porte sur la rédaction du nouvel article Lp. 383-12. Le texte initial proposait deux paragraphes presque identiques : l’un décrivait les envois personnels, l’autre les redéfinissait immédiatement après. Résultat : une redondance qui brouillait l’intention du législateur.
L’institution suggère donc de fusionner ces éléments en une définition claire : seules seront éligibles à la taxation simplifiée les marchandises occasionnelles, destinées strictement à un usage personnel ou familial.
Une clarification salutaire dans un pays où la confusion administrative a souvent servi de terreau à l’arbitraire.
La seconde faiblesse identifiée est plus préoccupante : le texte permet à l’administration douanière d’exiger du particulier la preuve que son colis n’a pas de finalité commerciale. Une charge de la preuve inversée, lourde et potentiellement injuste. Le CESE-NC appelle donc à définir non pas un simple doute, mais un doute légitime, fondé sur des éléments objectifs : fréquence des envois, quantités inhabituelles, nature des marchandises.
Enfin, la question du justificatif d’origine fait l’objet d’un avertissement ferme. Le CESE-NC refuse l’idée de dispenser les envois express même de faible valeur d’un certificat d’origine pour les marchandises bénéficiant d’une origine préférentielle.
Dans un monde saturé de produits importés peu respectueux des normes sociales ou environnementales, lever cette exigence reviendrait à encourager l’entrée de marchandises douteuses et à affaiblir les protections locales.
Le message est clair : la Nouvelle-Calédonie doit rester souveraine dans le contrôle de ce qui entre sur son sol.
SIMPLIFICATION, SURCOÛTS ET VIE CHÈRE : UN ÉQUILIBRE NÉCESSAIRE
La principale crainte exprimée lors des échanges avec les professionnels concernait un éventuel surcoût pour le consommateur. Et dans un territoire frappé de plein fouet par la vie chère, aggravée après les émeutes de 2024, le sujet est explosif.
Le CESE-NC ne nie pas que certains produits pourraient voir leur taxation évoluer à la hausse ou à la baisse selon les regroupements tarifaires. Mais il rappelle une réalité souvent occultée : les expressistes, confrontés à la complexité administrative actuelle, facturent parfois au particulier chaque ligne de déclaration douanière. Une procédure lourde, dissuasive et coûteuse.
En simplifiant la structure tarifaire, on élimine mécaniquement ces frais cachés. L’impact final pourrait donc être neutre, voire bénéfique.
Le CESE-NC juge ainsi le risque de surcoût acceptable au regard des gains de fluidité, de rapidité et de transparenceque procurera la réforme.
En d’autres termes, c’est un investissement dans la stabilité et l’efficacité, valeurs fondamentales d’un territoire qui veut avancer sans s’enliser dans des lourdeurs inutiles.
À l’issue de ses travaux, le CESE-NC rend un avis favorable à la majorité, fondé sur trois recommandations essentielles :
– rendre la rédaction du nouvel article Lp. 383-12 plus accessible ;
– encadrer le pouvoir de l’administration avec la notion de doute légitime ;
– maintenir l’obligation de justificatif d’origine pour les envois express de faible valeur.
Dans un monde où les flux commerciaux s’accélèrent, la Nouvelle-Calédonie ne peut plus rester spectatrice. Cette réforme, loin d’être purement technique, marque une étape clé : celle d’un territoire qui refuse la passivité et qui protège ses consommateurs, son économie locale et son intégrité réglementaire.
Un choix lucide, assumé et profondément responsable.













