La tension Chine-Japon franchit un seuil inédit après les propos de Takaichi sur Taïwan. Pékin réplique en frappant l’un des secteurs les plus sensibles : les exportations de poissons japonais.
Un embargo qui revient au pire moment pour Tokyo
La Chine a annoncé la suspension totale de ses importations de produits de la mer japonais, selon NHK et Kyodo.
Une décision brutale, survenue à peine quelques jours après la levée des restrictions imposées en 2023 à cause des rejets d’eaux traitées de Fukushima.
Officiellement, Pékin évoque un besoin de « nouvelles vérifications ».
Officieusement, personne n’est dupe : la mesure intervient en pleine crise diplomatique, au moment où Tokyo renforce sa ligne rouge sur Taïwan.
Le secteur japonais de la pêche est l’un des plus exposés : avant cette décision, la Chine représentait plus d’un cinquième des exportations totales de produits de la mer.
Ports, coopératives, mareyeurs, industries de transformation : tout l’écosystème est directement touché.
Dans un Japon déjà fragilisé par l’inflation et les tensions sécuritaires, l’impact économique pourrait être massif.
Le timing de Pékin renforce l’effet politique : l’embargo envoie un message clair, à la fois économique et stratégique.
Pour les alliés du Japon, notamment les États-Unis et l’Australie, cette riposte confirme une réalité : la guerre d’influence chinoise se mène aussi par les restrictions commerciales.
Les propos de Takaichi sur Taïwan, détonateur de la crise
Tout part d’une intervention du 7 novembre.
La Première ministre Sanae Takaichi affirme qu’une attaque chinoise contre Taïwan, mettant en danger la survie du Japon, pourrait justifier une réponse militaire.
Une déclaration conforme à la doctrine stratégique japonaise… mais totalement inacceptable pour Pékin.
Les réactions chinoises ont été immédiates :
– condamnations officielles ;
– éditoriaux virulents ;
– et surtout un message agressif du consul général Xue Jian, menaçant de « couper ce sale cou ».
Le commentaire a été supprimé, mais Tokyo a aussitôt convoqué l’ambassadeur chinois.
Le Japon a même conseillé à ses ressortissants en Chine d’éviter les lieux publics, signe de l’escalade. Cherchant à calmer le jeu, le diplomate japonais Masaaki Kanai s’est rendu à Pékin.
Résultat : poignée de main refusée, ton glacial, et une protestation formelle réitérée par Liu Jinsong. La Chine exige que Takaichi se rétracte, ce que Tokyo refuse fermement : ses propos reflètent la position officielle du Japon depuis plusieurs années.
Ce duel diplomatique montre à quel point Taïwan est désormais le cœur de la rivalité sino-japonaise.
Une crise qui déborde l’économie : culture, tourisme et diplomatie en otage
L’embargo sur les produits de la mer n’est qu’une partie de la riposte chinoise. Pékin a aussi recommandé à ses ressortissants d’éviter de voyager au Japon, un coup dur pour un secteur touristique déjà fragilisé.
La Chine a également décidé de reporter la sortie de deux films japonais, une pratique de pression déjà utilisée contre la Corée du Sud en 2017 lors du déploiement du système THAAD.
La relation Chine-Japon, fragile depuis plusieurs années, s’enfonce dans une zone de turbulences. Le dossier Taïwan y occupe une place centrale : Tokyo considère qu’un conflit dans le détroit menace directement sa sécurité nationale. Pékin, de son côté, voit dans chaque prise de position japonaise un acte d’hostilité. Dans cette dynamique, aucun geste ne semble capable pour l’instant d’enrayer la spirale.
Pour l’économie japonaise, le manque à gagner pourrait être considérable, notamment pour les régions côtières. Pour la diplomatie régionale, la crise symbolise un glissement plus large : le face-à-face Chine–Japon devient un élément structurant de l’équilibre indo-pacifique.















