Un constat glaçant pour la Polynésie : les chiffres de santé publique révèlent une population à risque. Derrière les lagons et les cartes postales, une crise sanitaire silencieuse se joue.
Un bilan de santé accablant pour les archipels
Les premiers résultats de l’étude Mataea, menée par l’Institut Louis Malardé avec l’appui de l’Institut Pasteur de Paris, sont sans appel : la Polynésie française fait face à une véritable bombe sanitaire.
Près de huit habitants sur dix en surpoids, plus de la moitié sont obèses et 40 % des hommes souffrent d’hypertension. Plus inquiétant encore : une personne sur quatre ignore être diabétique, ce qui signifie qu’un quart de la population vit avec une maladie grave sans traitement ni prévention.
Au-delà des chiffres bruts, les chercheurs mettent en avant un lien évident entre le mode de vie moderne et l’explosion des pathologies chroniques. Les excès alimentaires, l’abandon progressif des produits locaux et le manque d’activité physique ont transformé les archipels en un terrain fertile pour le diabète et l’obésité.
L’environnement et l’alimentation, vrais coupables
Contrairement à une idée reçue, la génétique n’explique pas à elle seule cette situation. Le séquençage réalisé sur près de 2 000 Polynésiens montre peu de différences entre archipels, et surtout aucune mutation massive favorisant l’obésité. Les chercheurs sont clairs : le problème vient avant tout de la nutrition et du mode de vie.
Le ministre de l’Agriculture, Taivini Teai, insiste : il faut casser le cliché d’une « prédisposition génétique » et assumer la responsabilité des choix alimentaires. En clair, les fast-foods, boissons sucrées et produits importés bon marché minent la santé des habitants. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : 22 % des personnes en surpoids présentent une obésité dite « morbide », avec des risques accrus de troubles métaboliques et cardiaques.
Face à cela, des programmes concrets émergent, comme « Tavivat », qui vise à introduire plus de produits locaux dans les cantines scolaires. Une orientation qui s’inscrit dans une logique de souveraineté alimentaire, essentielle pour réduire la dépendance aux importations et restaurer une alimentation saine.
Une urgence nationale de santé publique
Les maladies infectieuses aggravent encore la situation : 1 % de la population est porteuse de l’hépatite B, avec des pics atteignant 6,5 % aux Gambier. Aux mêmes îles, près de 9 % des habitants ont déjà subi au moins dix intoxications à la ciguatera. Ces pathologies, combinées au diabète et à l’obésité, placent la Polynésie dans une situation sanitaire critique.
L’étude Mataea ne se contente pas d’établir un diagnostic. Elle fournit aux autorités des indicateurs clés pour anticiper les épidémies et cibler les efforts de prévention. Mais le constat reste le même : sans une prise de conscience collective et des mesures fermes, la Polynésie risque une explosion des maladies chroniques dans les prochaines décennies.
Le temps du déni est terminé. Il ne s’agit plus de céder à une vision fataliste ou victimaire, mais de retrouver discipline et responsabilité individuelle. L’alimentation, l’activité physique et l’éducation sanitaire doivent redevenir des piliers de la société polynésienne. Car derrière chaque chiffre, c’est la santé d’un peuple et l’avenir d’un territoire français du Pacifique qui sont en jeu.