Une année de chaos, un territoire ébranlé, mais une société debout. La SEM Sud Habitat publie son rapport 2024, miroir d’une Nouvelle-Calédonie fracturée.
2024, l’année noire du logement social en province Sud
Le rapport d’activité 2024 de la SEM Sud Habitat est sans détour : l’année restera comme un séisme. La crise insurrectionnelle de mai a plongé la Nouvelle-Calédonie dans le désordre. Agences vandalisées, résidences incendiées, circulation coupée : le logement social a été directement pris pour cible. Le siège de Koutio a même failli partir en fumée, sauvé in extremis par la vigilance de locataires.
Les chiffres parlent d’eux-mêmes : 236 logements vacants sur 2 302 en décembre, soit un taux de vacance de 10,2 %, le double de celui du début d’année. Les impayés explosent : plus de 582 millions FCFP de loyers en retard, dont près de 200 millions en contentieux. Pour les familles, les difficultés financières représentent 49 % des départs de logements. Et pour la SEM, ces pertes sèches menacent directement son équilibre.
Le rapport rappelle une vérité implacable : sans ordre public, pas de logement social viable. La fragilité d’un modèle dépendant de la solidarité nationale est apparue au grand jour.
Discipline financière, proximité et résilience sur le terrain
Face à la tempête, la SEM n’a pas sombré. Dès juin, elle a rouvert des guichets temporaires, organisé le télétravail de ses agents et multiplié les permanences auprès des locataires. 902 foyers ont bénéficié d’aides au logement à la fin 2024, soit un effort massif dans un contexte d’incertitude.
La direction administrative et financière a assuré le paiement des fournisseurs sous 30 jours, parfois moins, évitant l’effondrement d’artisans et de prestataires déjà touchés par la crise. La gestion rigoureuse a été le maître-mot : indicateurs mensuels, tableaux de bord, pilotage par trinômes mêlant gestion locative, accompagnement social et entretien du patrimoine.
Sur le terrain, les équipes techniques ont multiplié les interventions. Plus de 450 signalements de malfaçons ont été traités malgré les blocages. 214 millions FCFP ont été investis dans le gros entretien, avec priorité donnée à la sécurité et à la remise en état rapide des logements. De Nouméa à Païta, en passant par Dumbéa et le Mont-Dore, des kilomètres de clôtures ont été remplacés, des toitures rénovées et des panneaux photovoltaïques installés.
La SEM a aussi fait preuve d’agilité : recours à la Croix-Rouge pour maintenir la médiation sociale dans les quartiers sensibles, distribution de colis alimentaires aux familles les plus fragiles, sécurisation renforcée des résidences avec l’appui des forces de l’ordre. Cohésion, discipline et présence sur le terrain ont été les maîtres-mots.
Préparer l’avenir : rénovation, partenariats et projets structurants
Si l’année a été dominée par la crise, le rapport 2024 trace aussi des perspectives. Deux chantiers majeurs se poursuivent : la résidence Hanaé à Païta (46 maisons jumelées) et l’opération Éridan à Dumbéa (42 logements), pour un total de 88 logements aidés représentant 2,1 milliards de FCFP.
Autre projet emblématique : l’extension de l’EHPAD de Tina, avec 26 lits supplémentaires et 5 places en accueil de jour. Un investissement de 730 millions FCFP, financé par la SEM, la province Sud et la Caisse des Dépôts, qui confirme la volonté d’apporter des réponses concrètes au vieillissement de la population calédonienne.
Le rapport insiste aussi sur la nécessité d’innover. La SEM a signé une convention avec Aquitanis, bailleur social bordelais, pour bénéficier de son expertise en rénovation urbaine, habitat participatif et gestion des syndics. La fresque participative de la résidence Arawa à Dumbéa illustre cette volonté de donner aux habitants un rôle dans la transformation de leur cadre de vie.
Enfin, la société travaille à valoriser ses fonciers inutilisés, comme le terrain de Plum ou celui de la rue Iékawé à Nouméa. Objectif : dégager des marges financières et réduire la dépendance aux subventions.
Au terme de 2024, la SEM Sud Habitat affiche un constat sans fard : la crise a fragilisé le logement social, mais n’a pas brisé l’élan. Avec 2 302 logements gérés, 70 résidences, 56 salariés mobilisés et des partenariats solides, la société démontre que le logement aidé reste une brique essentielle de la cohésion sociale en province Sud.
Son rapport délivre un message fort : seule une gestion ferme, transparente et enracinée dans l’autorité permettra de garantir l’avenir du logement social. L’heure n’est plus à la victimisation mais à la reconstruction. La SEM Sud Habitat a montré que, face au chaos, la rigueur et l’action sont les meilleures armes.