Un défi lancé entre cousins qui embrase l’Europe. Une querelle dynastique devenue une guerre totale entre deux nations sœurs : la France et l’Angleterre.
Le trône de France, une couronne disputée
La mort de Charles IV le Bel (dernier fils de Philippe le Bel), sans héritier direct, plonge la monarchie capétienne dans une crise. Désigné roi en 1328, Philippe VI de Valois incarne la continuité française, mais son accession n’est pas reconnue par tous. Outre-Manche, son jeune cousin, le roi Édouard III d’Angleterre, petit-fils de Philippe le Bel par sa mère, conteste la légitimité du Valois. L’étincelle est posée.
Dès le début de son règne, Philippe VI cherche à affirmer son autorité. En août 1328, il écrase les insurgés flamands au Mont Cassel, imposant la loi du roi face à la rébellion des villes marchandes. Mais ce succès militaire cache une tension plus profonde : la dépendance économique de la Flandre à la laine anglaise, nerf vital de ses manufactures.
Lorsque Philippe exige d’Édouard III l’hommage féodal pour la Guyenne et la Gascogne, terres tenues en fief du royaume de France, l’orgueil anglais s’enflamme. Les Plantagenêts n’entendent plus se soumettre à Paris.
Flandre, trahison et vengeance royale
La querelle prend une tournure explosive en 1336. Pour punir les Flamands fidèles au roi de France, Édouard III impose un embargo sur les exportations de laine anglaise, frappant de plein fouet les ateliers de Gand et de Bruges. Asphyxiés, les drapiers flamands se révoltent. Sous la houlette du marchand Jacob van Artevelde, ils se tournent vers le roi d’Angleterre.
C’est là que tout bascule : Artevelde pousse Édouard à revendiquer lui-même la couronne de France. Un défi politique et symbolique sans précédent. En réponse, Philippe VI confisque Bordeaux et la Guyenne le 24 mai 1337.
Quelques mois plus tard, le 7 octobre 1337, à Westminster, Édouard III jette le gant : il défie publiquement son cousin, qu’il nomme avec dédain « Philippe de Valois, qui se dit roi de France ». La guerre de Cent Ans vient de naître.
Robert d’Artois, l’intrigant qui attisa la flamme
Derrière cette confrontation se cache un homme : Robert III d’Artois, un noble français banni pour avoir falsifié des documents dans une querelle d’héritage. Beau-frère du roi Philippe VI, il trouve refuge à Londres et convainc Édouard III que la couronne de France est à portée de main.
Personnage flamboyant et manipulateur, Robert d’Artois joue le rôle du diable en exil, poussant le roi anglais à l’affrontement. Il inspirera plus tard à Maurice Druon un personnage central de sa saga « Les Rois maudits ».
En janvier 1338, Édouard III est couronné à Gand « roi de France » par ses alliés flamands. Dès lors, la rivalité Capétienne et Plantagenêt se transforme en un conflit de civilisation entre deux visions du pouvoir : la monarchie féodale française contre la monarchie centralisée anglaise.
Les premières années du conflit tournent à l’avantage des Anglais. La flotte française est anéantie à l’Écluse, le 24 juin 1340, brisant toute prétention maritime du royaume de France. Quatre ans plus tard, à Crécy, les archers anglais écrasent la chevalerie française dans une bataille restée célèbre pour son désastre tactique.
La France, affaiblie, voit s’ouvrir un siècle d’épreuves : invasions, trahisons et famines. Mais dans le chaos, la nation française va se forger, unifiée par la résistance et la foi.