Deux signaux lourds traversent l’Indo-Pacifique, Washington pousse Séoul à monter en puissance. Et la cible, à peine cachée, s’appelle Pékin.
La pression américaine monte pour contrer la Chine dans le Pacifique
L’escalade stratégique se précise. En visite à Séoul, l’amiral américain Daryl Caudle a envoyé un message limpide : la Corée du Sud ne pourra pas se contenter d’utiliser ses futurs sous-marins nucléaires pour la seule dissuasion face au Nord. Washington s’attend à ce que ces bâtiments participent à l’équilibre des forces face à la marine chinoise en pleine expansion.
Pour les États-Unis, le feu vert donné fin octobre par Donald Trump et le président sud-coréen Lee Jae Myung n’est pas seulement un geste diplomatique. C’est une étape dans la construction d’un réseau d’alliés capables d’endiguer la flotte de la PLA Navy, devenue la plus grande du monde en nombre de coques. Daryl Caudle le dit sans détour : disposer de sous-marins nucléaires, c’est assumer un rôle global, pas seulement régional.
Cette position américaine tranche avec la communication sud-coréenne, qui continue de présenter le programme comme un outil visant avant tout la menace nord-coréenne. Séoul privilégie la prudence, notamment alors que le président Xi Jinping cherche à renouer le dialogue et à réduire les tensions économiques.
Un projet stratégique… mais semé d’obstacles juridiques et diplomatiques
En coulisses, rien n’est simple. Le projet soulève déjà des désaccords entre les alliés : lieu de construction, modèle exact de sous-marin, partage industriel, et même la question explosive d’un éventuel accès américain à certains bâtiments. Rien n’est tranché, et Washington s’attend à un processus « long et complexe ».
La principale épine reste le pacte nucléaire américano-sud-coréen, qui interdit à Séoul d’utiliser du combustible nucléaire à des fins militaires. Il faudra donc renégocier, contourner ou réinterpréter ce cadre juridique particulièrement sensible. Les États-Unis savent qu’ils marchent sur une ligne fine : offrir la technologie sans déclencher une prolifération régionale.
Malgré ces obstacles, Washington insiste : c’est un moment historique, mais il faudra des années avant de voir un premier SSN sud-coréen sortir des chantiers. Pendant ce temps, la Chine accélère ses mises en service, modernise ses SNLE et multiplie les incursions navales dans le Pacifique occidental.
Un équilibre régional fragilisé alors que Pékin cherche à séduire Séoul
Le timing complique encore la donne. La visite récente de Xi Jinping en Corée du Sud – la première depuis onze ans – a envoyé un signal clair : Pékin veut rétablir un lien stratégique avec Séoul pour casser l’arc de coopération autour de Washington, Tokyo et Canberra.
Dans ce contexte, l’amiral Caudle rappelle que les capacités navales nord-coréennes ne constituent pas encore une menace directe pour les États-Unis. Le vrai défi, dit-il en filigrane, vient de la montée en puissance chinoise. Le message est clair : la Corée du Sud doit choisir le camp de la puissance maritime globale et assumer les responsabilités qui vont avec.
Quant aux débats internes américains – notamment la mobilisation du porte-avions USS Gerald R. Ford en Amérique latine, l’amiral se veut rassurant. Mais il reconnaît que les déploiements prolongés pèsent lourd sur la flotte américaine, déjà sollicitée sur plusieurs fronts simultanés.
En renforçant la Corée du Sud, Washington cherche donc à partager la charge. Avec l’idée que seuls des alliés dotés de moyens nucléaires pourront contenir une Chine désormais omniprésente de la mer de Chine à la haute mer.















