Alors que les missiles pleuvent entre Israël et l’Iran depuis mi-juin 2025, une autre guerre, plus silencieuse et symbolique, se joue sur TikTok. Pour la génération Z, c’est la première confrontation armée mondiale vécue en direct, et surtout à travers les formats qu’elle maîtrise : vidéos, mèmes, humour noir. Si le contexte géopolitique reste brûlant, les codes de cette jeunesse, eux, transforment la manière dont un conflit peut être appréhendé, digéré, et partagé à l’échelle planétaire.
Conflit Israël-Iran : rappels factuels
Depuis le 14 juin 2025, Israël mène des frappes ciblées contre des infrastructures militaires et nucléaires iraniennes. En retour, Téhéran a riposté par des tirs de missiles balistiques visant plusieurs zones urbaines israéliennes. Les pertes humaines s’élèveraient à plusieurs centaines de morts selon les sources officielles, même si aucun bilan indépendant n’a encore pu être vérifié.
Dans le sillage de cette escalade, les appels à la désescalade se multiplient, notamment ceux du G7 et de l’Union européenne, mais sans effet concret jusqu’à présent.
« My First War, kinda nervous » : la guerre en mème
Sur TikTok, l’expression « My First War » est devenue virale. Ce format, popularisé par des comptes comme @rakanmunjed, juxtapose images de bombardements, visuels de soldats ou alarmes anti-aériennes, sur des musiques pop ou des filtres ironiques.
Le ton est volontairement décalé : pour des millions de jeunes, cette ironie sert d’exutoire face à l’angoisse provoquée par le conflit. À ce jour, certaines vidéos dépassent les 28 millions de vues, confirmant l’émergence d’une nouvelle grammaire de guerre propre à la Gen Z.
“The more humour, the less trauma” : cette phrase, largement relayée, résume le positionnement de toute une génération.
Une stratégie de coping face à l’angoisse
Si ce traitement par l’humour interroge, il relève surtout d’un mécanisme de défense. La distance émotionnelle que permet le mème protège de l’effondrement psychologique.
Mais cette lecture ne fait pas l’unanimité. Certains commentateurs jugent la légèreté de ces contenus déplacée face aux drames humains en cours. Le débat est vif, notamment entre générations.
TikTok, refuge numérique en temps de guerre
Dans les deux camps, les jeunes investissent les plateformes pour raconter leur guerre. En Iran, TikTok, mais aussi WhatsApp ou Discord, deviennent des canaux d’expression et de contournement de la censure. On y retrouve des vidéos de danses, des chants anti-Khamenei, ou encore des témoignages de peur et d’espoir.
Côté israélien, de jeunes soldats ou civils utilisent TikTok pour relater leur quotidien sous les sirènes, parfois avec humour, parfois avec gravité.
Désinformation : terrain miné
Cette guerre numérique n’échappe pas aux dérives. Sur TikTok, les contenus pro-palestiniens ou anti-israéliens sont massivement viralisés, bien plus que ceux considérés comme « pro-Israël » selon plusieurs études. L’algorithme de la plateforme favoriserait les récits clivants, alimentant un écosystème où la nuance peine à survivre.
En parallèle, des vidéos falsifiées, des images sorties de leur contexte ou des faux témoignages circulent massivement.
Une nouvelle mémoire de la guerre
Ce que vit aujourd’hui la Gen Z, c’est une guerre vécue comme événement numérique mondial, même si géographiquement circonscrite. L’expression « première guerre TikTok » prend ici tout son sens. Les images, les sons, les mèmes créent une mémoire collective instantanée, sans les filtres des médias traditionnels.
Mais cette guerre vue à travers l’écran ne signifie pas indifférence : elle témoigne au contraire d’un nouveau mode d’engagement émotionnel et politique propre à cette génération.
TikTok, plus qu’un réseau social, s’impose comme le miroir numérique d’un monde en tension. Pour la Gen Z, la guerre Iran-Israël devient un objet à décrypter, commenter, détourner et parfois même dénoncer.
Entre humour de survie, engagement civique et désinformation rampante, cette génération façonne une nouvelle manière de vivre la guerre, à l’ère des écrans.