Meurtre, procès annulés, nouveau livre : Olivier Pérès brise le silence sur l’affaire judiciaire la plus explosive du pays.
Chirurgien renommé, détenu puis auteur : Olivier Pérès livre sa version du drame de Tina
Plusieurs tir en pleine journée sur le golf de Tina. Une victime, un médecin en garde à vue, puis un procès sous tension. Sept ans après les faits, Olivier Pérès, ancien chef de service au CHT de Nouméa, raconte tout dans un livre choc : Autopsie d’un fiasco judiciaire. Condamné, libéré, rejugé, déplacé : l’affaire est un labyrinthe judiciaire à rebondissements. À travers ce témoignage personnel, l’ancien chirurgien tente de reprendre la main sur un récit qui lui a échappé. Mais peut-on vraiment faire la lumière sur un meurtre entre voisins ?
Le drame de Tina : trois balles, un mort, deux vies brisées
Le 13 septembre 2018, sur le golf de Tina à Nouméa, trois coups de feu claquent. L’homme abattu est Éric Martinez, un voisin d’Olivier Pérès. Le tireur ne nie pas : c’est lui. Mais dès les premières heures, la version des faits divise.
Il m’a menacé, j’ai tiré par peur
affirmait le chirurgien, dès sa garde à vue.
Proximité géographique, tensions accumulées, querelles anciennes : le décor est celui d’un drame ordinaire… dans un quartier pas si ordinaire. Très vite, la justice parle d’assassinat, évoquant une préméditation. O Pérès est un homme éduqué, armé, et présumé responsable d’un acte pensé à l’avance. L’avocat de la famille Martinez dénonçait alors :
Il a tué de sang-froid, pas dans un accès de panique.
Mais le dossier s’enlise. Les témoignages sont contradictoires. Le mobile reste flou. Le passé des deux hommes ressurgit. Et bientôt, le procès devient plus opaque que le crime.
Une machine judiciaire en panne : annulations en série
Condamné une première fois en 2022 à 20 ans de réclusion pour assassinat, O.Pérès voit sa peine allégée à 15 ans en appel, la cour rejetant la préméditation. Puis, en mai 2024, la Cour de cassation annule tout, faute de motivation claire sur un point médical essentiel.
Le droit à un procès équitable implique la prise en compte des demandes d’expertise
tranche la Cour.
La décision relance tout. En novembre 2024, un dépaysement est ordonné : cap sur Lyon. Pourquoi ? Trop de magistrats calédoniens ont été liés à l’affaire. La justice locale est accusée de proximité. L’enquête est alors reprise loin des cocotiers, dans un climat plus neutre… ou plus froid.
Dans l’intervalle, Olivier Pérès est libéré, sous contrôle judiciaire. Mais la liste des interdits est longue : pas de sortie du territoire, pas de contact avec les témoins, pas de retour à Tina.
Un livre pour raconter… et reconquérir l’opinion ?
Déjà auteur en 2021 d’un premier ouvrage (Le Diable existe), Olivier Pérès revient en 2025 avec un second livre, plus frontal, plus incisif : Autopsie d’un fiasco judiciaire.
Une stratégie éditoriale ? Un cri de défense ? Un acte de revanche ? Dans ce récit, l’auteur revient en détail sur chaque étape :
- le drame du 13 septembre 2018,
- les tensions de voisinage,
- le procès en 2022,
- la réduction de peine en 2023,
- la cassation en 2024,
- et le transfert du dossier à Lyon.
J’ai vécu un engrenage, une machine à broyer.
écrit-il dans l’introduction.
Le livre, classé “histoire vraie”, est diffusé en Nouvelle-Calédonie, notamment chez Calédolivres, et suscite déjà la controverse. Pour certains, il s’agit d’un témoignage précieux dans un pays où les procès médiatisés sont rares. Pour d’autres, c’est une tentative de manipulation de l’opinion.
On ne refait pas l’histoire avec un stylo
lâche un proche de la victime.
Un procès à venir, une société à interroger
Avec un troisième procès désormais prévu à Lyon, l’affaire Pérès n’est pas terminée. Elle pose des questions de fond sur :
- la gestion des violences dans les quartiers résidentiels,
- la capacité du système judiciaire calédonien à juger ses élites,
- et la puissance des récits personnels dans le débat public.
Ce livre est-il un outil de justice… ou un moyen de réécriture ? La justice tranchera, une fois encore. Mais dans cette affaire hors normes, l’opinion, elle, est déjà divisée.
Une affaire judiciaire devenue affaire de société
Ce n’est plus simplement un procès pour meurtre. L’affaire Olivier Pérès interroge l’équilibre entre justice, notoriété et vérité personnelle. Peut-on encore croire en une justice impartiale quand le poids médiatique devient écrasant ? Peut-on écrire sa vérité sans effacer celle des autres ?
La justice se rend dans les tribunaux. Le pardon, lui, reste ailleurs.