Une percée médicale silencieuse mais capitale vient d’avoir lieu en Nouvelle-Calédonie.
Au CHT, pour la première fois, un patient atteint d’un cancer du côlon a bénéficié d’une double intervention simultanée : ablation chirurgicale et destruction ciblée de métastases par micro-ondes. Une alliance inédite entre chirurgie viscérale et radiologie interventionnelle, qui donne des résultats prometteurs.
Une coopération chirurgicale inédite au bloc opératoire
Il s’agit d’un protocole jamais observé jusqu’ici sur le territoire. Cette intervention coordonnée a permis de traiter en une seule fois la tumeur principale et les métastases hépatiques. Le patient, transféré depuis une clinique privée, a été opéré par une équipe mixte : d’abord le chirurgien viscéral, qui a retiré le côlon atteint, puis la radiologue interventionnelle, qui cible les lésions hépatiques avec une sonde à micro-ondes, sans incision supplémentaire.
L’échographie per-opératoire a permis de détecter de minuscules métastases jusque-là invisibles à l’IRM. Résultat : un gain de temps, une hospitalisation raccourcie et moins de risques de rechute ou de dissémination du cancer.
Ce type d’intervention pourrait devenir un standard dans certaines prises en charge oncologiques complexes, à condition d’investir dans des moyens matériels et humains adaptés.
Radiologie interventionnelle : une spécialité capitale mais invisible
Derrière ce succès discret, une spécialité encore trop peu connue en Nouvelle-Calédonie : la radiologie interventionnelle. Elle s’appuie sur des techniques mini-invasives pour traiter ou diagnostiquer de nombreuses pathologies, souvent en soutien d’autres services. Au CHT, près de 1800 actes de ce type sont réalisés chaque année, dans des contextes aussi variés que les AVC, les hémorragies internes, les douleurs osseuses, les fibromes ou encore les cancers.
La montée en puissance de cette discipline repose aussi sur l’expertise locale. En poste depuis trois ans, la radiologue ayant réalisé l’ablation par micro-ondes fait partie des rares spécialistes du genre dans le Pacifique francophone. Formée aux dernières technologies, elle incarne une nouvelle génération de praticiens exigeants et polyvalents.
Son travail transforme la prise en charge des patients fragiles ou inopérables, en offrant des alternatives à la chirurgie lourde, tout en limitant les évacuations sanitaires.
L’innovation médicale au cœur d’un système sous pression
Cette avancée survient dans un contexte particulièrement tendu pour le système de santé calédonien. Depuis les émeutes de mai 2024, les départs de médecins se multiplient, deux hôpitaux ont dû fermer, et les urgences tournent avec des effectifs réduits. L’accueil de médecins étrangers, notamment en provenance du Burundi et du Maroc, représente un recours nécessaire mais partiel.
Face à cette pénurie, le gouvernement tente aussi de fidéliser les professionnels en poste. Conventionnements, primes, recrutement anticipé d’infirmiers en cours de formation… Plusieurs leviers sont activés. L’un des axes d’avenir reste le développement des infirmiers en pratique avancée, capables de prendre en charge une partie des actes médicaux, avec des formations actuellement dispensées en Métropole.
Mais l’innovation ne peut s’arrêter à la gestion des crises. En dotant le CHT d’un générateur de micro-ondes, l’établissement renforce son offre en oncologie interventionnelle, avec en ligne de mire l’arrivée de la cryothérapie. Cette nouvelle arme thérapeutique pourrait compléter l’arsenal local, jusqu’ici limité à la radiofréquence et aux micro-ondes.
Dans une région où certaines maladies (AVC précoces, cancers tardifs, accidents de la route) sont plus fréquentes qu’en Métropole, la radiologie interventionnelle offre un espoir stratégique. Elle permet une médecine rapide, ciblée, économique, et centrée sur le patient. Reste à lui donner la place qu’elle mérite, au sein du système hospitalier calédonien.