En décidant de reconnaître un État palestinien à l’ONU en septembre, Emmanuel Macron a déclenché une tempête politique et géopolitique.
Si la gauche française salue une décision « historique », la droite et plusieurs alliés occidentaux dénoncent un revirement stratégique dangereux, susceptible de bouleverser l’équilibre régional.
Macron seul contre tous : une reconnaissance sous le feu des critiques
Annoncée le 24 juillet par le président français, la reconnaissance de la Palestine est perçue par une large partie de la droite française comme un abandon des principes de sécurité posés par Paris trois mois plus tôt.
Pour Les Républicains, aucune des cinq conditions fixées – démilitarisation du Hamas, libération des otages, réforme de l’Autorité palestinienne, reconnaissance d’Israël, cadre sécuritaire régional – n’est remplie.
Dans ce contexte, officialiser un État palestinien reviendrait à légitimer indirectement une organisation islamiste encore engagée dans un conflit armé.
Cette vision est partagée par le Premier ministre israélien, qui accuse la France de récompenser la violence terroriste du Hamas, auteur de l’attaque du 7 octobre 2023.
Selon Israël, cette reconnaissance précipitée pourrait même favoriser la création d’un nouveau bastion iranien au cœur du Proche-Orient, transformant la future entité palestinienne en base avancée contre l’existence même d’Israël.
Outre-Manche et outre-Atlantique, les alliés occidentaux s’inquiètent : les États-Unis jugent cette décision « imprudente » et estiment qu’elle affaiblit le processus de paix, en donnant un écho international à la propagande islamiste sans contrepartie concrète sur le terrain.
Soutiens arabes et européens : une reconnaissance qui fait école
Mais la position française ne suscite pas que de la colère.
Dans le monde arabe, elle est saluée comme un acte de souveraineté diplomatique courageux.
L’Arabie saoudite salue une décision historique, alignée sur le droit international, et appelle d’autres capitales à suivre l’exemple de Paris.
La Jordanie y voit un pas décisif contre les stratégies d’effacement du peuple palestinien, tandis que plusieurs dirigeants de l’Organisation de libération de la Palestine remercient la France pour son engagement clair en faveur de l’autodétermination.
L’Europe elle-même est divisée.
L’Espagne, l’Irlande et une partie des pays scandinaves soutiennent cette avancée diplomatique, qu’ils considèrent comme la seule issue crédible à un conflit gelé depuis des décennies.
Pour eux, la solution à deux États ne peut exister sans reconnaissance formelle, même si les conditions sur le terrain ne sont pas encore idéales.
Face à cette mosaïque de réactions, la ligne diplomatique française semble en réinvention : ni alignée sur Washington, ni solidaire d’Israël à tout prix, mais revendiquant un rôle d’intercesseur au service de la paix, quitte à heurter ses partenaires historiques.
Une fracture politique en France, entre électoralisme et souveraineté
Sur le plan intérieur, la décision d’Emmanuel Macron fragilise l’exécutif.
La droite gaulliste comme l’extrême droite y voient une manœuvre électoraliste, destinée à séduire certains segments de l’opinion.
Le Rassemblement national, qui pourtant soutient officiellement la création d’un État palestinien dans un cadre négocié, accuse l’Élysée de brader la sécurité d’Israël et de légitimer la violence islamiste.
Reconquête, dans la même veine, agite le spectre d’un djihad institutionnalisé au sein des Nations unies.
Face à cela, la gauche applaudit à deux mains.
Pour La France insoumise et Europe Écologie, cette reconnaissance est une condition essentielle pour mettre fin à l’impunité d’Israël et réparer les déséquilibres d’un conflit asymétrique.
Le clivage politique est donc profond, presque irréconciliable.
Dans cette cacophonie, Les Républicains rappellent leur attachement historique à la paix par la négociation.
Favorables à un État palestinien, oui, mais à condition que ce dernier reconnaisse Israël, renonce à l’armement et soit le fruit d’un processus global, non d’un geste unilatéral.
Une position qui résonne avec celle d’Emmanuel Macron… en avril dernier.
En reconnaissant un État palestinien sans garanties concrètes, la France s’expose à une fracture diplomatique majeure. Entre soutien arabe, colère israélienne et crispation occidentale, l’initiative d’Emmanuel Macron redessine les équilibres — au risque de fragiliser la paix autant que de la servir.