Chaque année, les baleines à bosse affluent dans les eaux calédoniennes. Mais en ce mois de juillet, un cambriolage freine brutalement les missions scientifiques.
Une mission scientifique sabotée en pleine saison d’observation
Depuis trente ans, l’association Opération Cétacés œuvre sans relâche à la connaissance et à la protection des mammifères marins en Nouvelle-Calédonie. Basée chaque saison dans le sud du lagon, l’équipe, composée de scientifiques et de bénévoles, sillonne les eaux de Prony à la rencontre des baleines à bosse, entre collecte d’échantillons, relevés acoustiques et suivi comportemental.
Mais cette année, à peine les premières sorties réalisées, le programme est brutalement suspendu. Des individus se sont introduits par effraction dans la maison du village servant de base logistique à l’équipe. Résultat : du matériel scientifique volé, des effets personnels dérobés et des missions compromises. Impossible de reprendre la mer dans l’immédiat. L’association dénonce un acte irresponsable qui porte atteinte à la recherche scientifique et à la conservation d’espèces menacées.
Un vrai coup de gueule pour l’équipe, qui rappelle que son action bénéficie à toute la société calédonienne, qu’il s’agisse de la protection de la biodiversité, du soutien aux opérateurs touristiques ou de la vulgarisation scientifique.
Baleines à bosse : des visiteurs fragiles et encore menacés
Chaque hiver austral, les baleines à bosse quittent les eaux glacées de l’Antarctique pour se reproduire dans les lagons chauds du Pacifique. De juillet à septembre, elles croisent au large de la Nouvelle-Calédonie, au rythme des souffles et des sauts spectaculaires.
Si la population mondiale a connu un net rebond depuis le moratoire de 1986 sur la chasse commerciale, les baleines océaniennes restent classées « en danger » par l’UICN. C’est le cas de celles observées en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française.
Dans ce contexte, chaque donnée collectée en mer est précieuse pour comprendre leur état de santé, suivre leurs chants et identifier les corridors migratoires empruntés. L’association participe notamment au projet international Blue Corridors, qui compile plus de trente ans de suivis de cétacés à travers le monde, incluant une soixantaine de trajets réalisés depuis la Nouvelle-Calédonie.
Une activité encadrée, un tourisme à responsabiliser
L’observation des baleines est un pilier du tourisme nature calédonien, mais elle obéit à des règles strictes. Encadrée par le Code de l’environnement de la province Sud, la pratique doit éviter tout stress ou dérangement pour les animaux. Ces mammifères marins sont aussi très importants dans la culture kanak du Sud, puisqu’ils sont le signe que leur arrivée dans les eaux au large de l’île Ouen marque les prémices de la plantation de l’igname, tubercule sacré dans le monde kanak. De jeunes vandales qui n’ont peut-être pas cet appétit pour leur propre culture.
À ce titre, Opération Cétacés accompagne chaque saison skippers, opérateurs touristiques et gardes-nature dans une journée de formation complète : connaissances sur les baleines à bosse, dernières données scientifiques, rappel des distances minimales et utilisation de l’outil participatif Happywhale.
Car au-delà des bateaux, l’observation depuis la terre ferme reste une alternative accessible et respectueuse. Le cap N’Dua, à l’extrémité du Grand Sud, propose une aire aménagée pour suivre les cétacés à la jumelle. Une solution idéale pour le grand public, sans impact sur les animaux.
Mais les événements récents viennent rappeler que la protection des baleines passe aussi par le respect du travail scientifique, sur terre comme en mer. Et qu’un simple acte de vandalisme peut freiner durablement une dynamique collective construite patiemment depuis trois décennies.