L’accord de Bougival introduit une règle de majorité renforcée au Congrès de Nouvelle-Calédonie : il faudra réunir 36 voix sur 56 pour demander le transfert de compétences régaliennes. Mais rien ne pourra se faire sans la voix des Calédoniens : tout transfert devra être validé par référendum. Cette mécanique vise à garantir que les décisions sur l’avenir institutionnel reposent à la fois sur un consensus politique large et sur l’approbation populaire.
Le précédent des Samoa
L’indépendance des Samoa occidentales (1962), première du Pacifique, fut précédée d’un référendum en 1961, qui valida la nouvelle Constitution par environ 85 % des voix. Ce texte, une fois adopté, prévoyait que toute modification constitutionnelle devait être approuvée par une majorité des deux tiers du Parlement. Autrement dit, la super-majorité n’a pas été la condition de l’indépendance elle-même, mais bien une garantie pour l’avenir institutionnel.
Les cas des Îles Cook et de Niue
Dans les années 1960-1970, les Îles Cook et Niue ont choisi la libre-association avec la Nouvelle-Zélande. Là aussi, la population a été consultée par référendum. Les Constitutions locales ont ensuite intégré des mécanismes de majorité qualifiée pour toute révision future.
Fidji : un verrou constitutionnel vite balayé
Aux Fidji, la Constitution de 1970 prévoyait que certaines révisions fondamentales devaient être adoptées à une majorité qualifiée au Parlement. Mais ces garde-fous n’ont pas résisté aux coups d’État militaires qui ont marqué la vie politique fidjienne dans les décennies suivantes.
Une inspiration régionale, mais pas uniforme
L’accord de Bougival s’inscrit donc dans une tradition régionale qui valorise le consensus politique élargi avant toute évolution majeure. Mais chaque territoire du Pacifique a suivi son propre chemin. La super-majorité est une constante de prudence institutionnelle, pas une règle uniforme. En Nouvelle-Calédonie, l’exigence de 36 voix au Congrès et d’un référendum populaire combine ces deux dimensions.
Une protection contre les minorités radicales
Derrière la technicité des chiffres, le message est clair : Bougival a voulu verrouiller l’avenir institutionnel du territoire. Plus question qu’une minorité radicale, bruyante mais isolée, impose son agenda au reste du pays. Avec ce double verrou, Congrès et référendum, les Calédoniens s’assurent que l’avenir de l’archipel ne se décidera ni dans les arrière-salles d’un parti, ni sous la pression de quelques leaders revanchards, mais bien par un consensus large et par la voix du peuple.