Deux constats frappants : la France consomme moins de matières premières que la moyenne européenne, mais elle dépend toujours largement de l’extérieur.
Derrière ces chiffres, c’est l’avenir de notre souveraineté économique et écologique qui se joue.
France : une consommation de matières sous la moyenne européenne
En 2023, la consommation intérieure de matières (DMC) de la France atteint 813 millions de tonnes, soit 11,9 tonnes par habitant, un niveau inférieur à la moyenne européenne (13,5 t/hab). Cette donnée, publiée par les ministères de l’Aménagement du territoire et de la Transition écologique, souligne une double réalité : d’un côté, notre pays consomme un peu moins que ses voisins ; de l’autre, il reste très dépendant des importations, notamment pour l’énergie.
Près de 60 % de cette consommation concerne des matériaux de construction : graviers, sables, granulats. Autrement dit, la France bâtit, aménage, construit. C’est la marque d’un pays qui investit encore dans ses infrastructures. Sur ces 813 millions de tonnes, 701 sont extraites ou produites sur le territoire — preuve que la ressource nationale reste un pilier.
Mais le constat est sans appel : la moitié des matières importées sont des combustibles fossiles, tandis que la biomasse constitue l’essentiel des exportations. La dépendance énergétique demeure un talon d’Achille, dans un contexte où la souveraineté économique est plus que jamais un enjeu stratégique.
Le poids écrasant des matériaux de construction et de la biomasse
Les chiffres montrent une stabilité : les minéraux non métalliques représentent 57 % des matières consommées. Graviers et sables dominent, alimentant les chantiers publics et privés. Derrière ces matériaux, c’est tout le secteur du BTP qui conditionne la courbe de la consommation. La baisse de 2009, liée à la crise, illustre à quel point la construction reste le moteur principal.
À côté, la biomasse pèse près d’un tiers de la consommation. Issue de l’agriculture, de la pêche et de la forêt, elle retrouve en 2023 des niveaux élevés, portée par une meilleure année climatique. Avec 237 millions de tonnes, la biomasse extraite en France atteint son plus haut niveau depuis 2018.
Les combustibles fossiles, eux, reculent de 4 %, tombant à leur plus bas niveau hors crise sanitaire. Si la France consomme donc moins de pétrole, de charbon et de gaz qu’avant, la dépendance reste forte, puisque la production nationale est quasi inexistante. Les importations continuent de combler la totalité des besoins.
Moins d’importations, mais une souveraineté à reconquérir
En 2023, les importations de matières chutent de 6 %, pour atteindre 309 millions de tonnes, le plus bas niveau depuis 1997. Un chiffre en trompe-l’œil : si les volumes baissent, c’est aussi parce que les prix de l’énergie flambent et que la sobriété énergétique s’impose. Les combustibles fossiles représentent toujours 40 % des importations, suivis par les minerais métalliques et la biomasse.
Les exportations reculent elles aussi, à 197 millions de tonnes. Mais un fait marquant demeure : la biomasse française domine, représentant 43 % des flux sortants. Là encore, c’est l’agriculture qui maintient le pays dans la compétition mondiale.
À long terme, la tendance est claire : la France a réduit sa consommation de matières par habitant, passant de 14,3 t/hab en 1990 à 11,9 t/hab en 2023. La productivité matières, elle, explose : de 1,88 €/kg en 1990 à 3,18 €/kg aujourd’hui. Autrement dit, la France produit plus de richesse avec moins de matières. C’est une bonne nouvelle pour l’économie et pour l’environnement.
Mais cette amélioration ne doit pas masquer la réalité : sans autonomie énergétique, la souveraineté reste fragile. La transition écologique ne peut réussir sans stratégie industrielle solide, capable de réduire les importations et de renforcer la production nationale. C’est là le défi des prochaines années : produire davantage, dépendre moins, tout en protégeant l’environnement.