Un sondage publié en juillet dernier est venu balayer les illusions : 72 % des Calédoniens citent la santé, l’emploi et la sécurité comme leurs priorités absolues. Loin derrière, les débats institutionnels et les querelles idéologiques apparaissent comme secondaires, presque hors-sol. Pourtant, une partie du FLNKS continue de s’enfermer dans des débats symboliques. Résultat : pendant que les familles se débattent avec des factures de soins, des dispensaires fermés et des hôpitaux amputés, la politique s’épuise à commenter des drapeaux et des textes d’accords.
Les collectivités à l’offensive, pendant que le système craque
La situation sanitaire est alarmante. En un an, 250 soignants ont quitté le territoire. Le Médipôle a perdu une centaine de lits et fermé la moitié de ses blocs opératoires. Dans les quartiers populaires de Nouméa – Rivière-Salée, Tindu, Kaméré – il n’y a plus de généralistes. Les urgences tournent avec 50 % de leurs effectifs.
Face à cette hémorragie, la province Sud a pris les devants. À Bourail, un CMS flambant neuf, financé à hauteur de 130 millions de francs CFP, a été inauguré.
Ce centre joue un rôle régional, y compris pour les habitants du Nord
a rappelé Sonia Backès. Preuve que les carences du système dépassent les frontières administratives : un patient sur cinq vient désormais de la province Nord.
Tous les dispensaires sudistes ont été rénovés avec l’appui de l’État. Mais la rénovation ne suffit pas : il faut attirer des médecins et les retenir. Kits d’installation, aides financières, locaux modernes… tout est mis en place pour éviter un désert médical grandissant.
L’Ordre de Malte, réponse concrète aux attentes
Dans ce chaos, un acteur inattendu s’est imposé : l’Ordre de Malte. À Bourail, sous l’égide de Manuel Valls, une convention historique a été signée. Dès l’automne, une brigade itinérante de cinq professionnels de santé interviendra dans les communes privées de médecins.
Cet engagement ne relève pas de la symbolique, mais d’une réponse concrète aux familles livrées à elles-mêmes. Fondé il y a près de mille ans, présent dans 36 pays, l’Ordre de Malte s’appuie sur un credo simple : « Servir les pauvres et protéger la foi ». Une maxime qui trouve un écho brutal en Nouvelle-Calédonie, où des dispensaires n’ont pas vu de blouse blanche depuis des mois.
Après les émeutes de mai 2024, cette présence illustre une solidarité internationale qui agit, loin des postures. Pendant que certains militants se concentrent sur des débats institutionnels, l’Ordre de Malte soigne, écoute, soutient.
Recrutements d’urgence et réformes nécessaires
Le gouvernement, lui, tente de combler les vides. Médecins venus du Vietnam, du Maghreb, du Mexique ou de Roumanie, arrivée d’infirmiers en pratique avancée inspirés du modèle australien, spécialisation accrue sur le diabète ou la santé mentale : la stratégie est claire, même si elle traduit l’urgence d’un système en perdition.
Parallèlement, des mesures structurelles ont été annoncées : taxe sur le sucre, renforcement de la santé scolaire, création d’une agence de régulation des dépenses. Mais le nerf de la guerre reste le personnel.
« L’urgence, c’est le personnel. Mais il faut aussi financer, prévenir, gouverner »
martèle un membre du gouvernement.
Le FLNKS piégé dans les symboles, les familles dans la colère
C’est là que le contraste frappe. Alors que les Calédoniens réclament de la santé, de l’emploi et de la sécurité, une partie du FLNKS persiste dans une stratégie politique centrée sur les symboles. Or, les chiffres sont implacables : 72 % des citoyens jugent ces querelles idéologiques secondaires.
Dans les familles, la lassitude se transforme en colère.
Si on veut un système qui prenne soin des Calédoniens, il faudra enfin prendre soin des soignants
résume le Dr Kader Saïdi. Une déclaration qui fait écho au ressenti général : ce n’est pas d’un nouvel affrontement symbolique dont les Calédoniens ont besoin, mais de médecins, d’emplois et d’une sécurité retrouvée.
La Nouvelle-Calédonie est à la croisée des chemins. Continuer à s’épuiser dans des débats institutionnels déconnectés, ou choisir enfin de reconstruire un système de santé digne, appuyé sur des infrastructures modernisées, des recrutements ciblés et une prévention renforcée. L’accord de Bougival pourrait offrir ce cadre apaisé pour rendre le territoire à nouveau attractif et stable.
En attendant, c’est l’Ordre de Malte, fort de mille ans d’expérience humanitaire, qui incarne l’espoir. Preuve qu’au-delà des querelles idéologiques, la vraie bataille se joue dans les dispensaires, les hôpitaux et les quartiers populaires : celle de soigner, protéger et restaurer la dignité des Calédoniens.