L’évolution fulgurante des technologies de stockage d’énergie transforme profondément les équilibres du marché des métaux, avec des conséquences directes pour le nickel calédonien. La généralisation des batteries lithium-fer-phosphate (LFP), plus abordables et ne contenant ni nickel ni cobalt, redessine les contours de la transition énergétique mondiale.
Jusqu’à récemment, le nickel était présenté comme un pilier de l’électrification, en particulier pour les batteries haute performance des véhicules électriques. La Nouvelle-Calédonie, avec ses importantes ressources, espérait tirer parti de cette demande croissante. Pourtant, les dynamiques du marché ont radicalement changé. La percée des batteries LFP, dont le coût a été divisé par deux en moins de deux ans, les rend désormais incontournables pour les projets de stockage d’énergie, en forte croissance à l’échelle mondiale.
Le projet Thorpe Marsh au Royaume-Uni illustre cette révolution : il deviendra la plus grande installation de stockage d’énergie d’Europe grâce à des batteries LFP importées de Chine. Ce segment, soutenu par les énergies renouvelables, croît plus rapidement que celui des véhicules électriques. Or, ce sont précisément les batteries LFP qui dominent ce marché, reléguant le nickel et le cobalt à un rôle secondaire.
Les chiffres sont sans appel
En quatre ans, l’intensité d’utilisation du nickel dans les batteries a chuté d’un tiers, celle du cobalt de deux tiers. Résultat, les cours mondiaux se sont effondrés : -50 % pour le nickel, -60 % pour le cobalt. En Nouvelle-Calédonie, déjà confrontée à une crise structurelle de son industrie du nickel, cette nouvelle donne menace la viabilité des sites miniers et métallurgiques.
D’autres facteurs accélèrent cette mutation : les préoccupations environnementales et éthiques liées à l’extraction du nickel et du cobalt pèsent sur leur attractivité, tandis que la Chine, leader incontesté dans la fabrication de batteries LFP, renforce sa domination mondiale.
Pour la filière nickel calédonienne, l’heure est à la réinvention. Il lui faudra diversifier ses débouchés, innover vers des usages industriels alternatifs ou se positionner sur des marchés où la traçabilité et la durabilité peuvent constituer un avantage. Faute d’adaptation, le nickel calédonien risque de se retrouver à contretemps d’une transition énergétique qu’il espérait accompagner.
Sources : Mining – Mai 2025