Perte de souveraineté maritime
Rien ne va plus entre le membre du gouvernement calédonien Jérémie Katidjo Monnier et les pêcheurs hauturiers. Dans un courrier adressé au Président du Gouvernement, la Fédération des Pêcheurs Hauturiers tire la sonnette d’alarme face à deux décisions jugées lourdes de conséquences : l’extension unilatérale des zones marines protégées, et le recours à des financements étrangers via une ONG américaine.
Au cœur de la polémique :
L’extension sans concertation de 10 % des Zones de Protection Forte (ZPF) dans le Parc Naturel de la Mer de Corail, s’ajoutant aux 10 % déjà instaurés. Une décision annoncée lors du comité de gestion de 2025, sans avis préalable des professionnels de la mer. Pour les pêcheurs, c’est un coup porté à une filière pourtant exemplaire, durable et essentielle à l’autosuffisance alimentaire du territoire.
Mais la colère monte surtout autour d’un volet financier. La création d’un Fonds calédonien pour la biodiversité s’accompagne de l’entrée en scène du programme américain “Unlocking Blue Pacific Prosperity”, soutenu par la fondation de Jeff Bezos. En jeu : 4 millions de dollars destinés à financer la conservation, mais conditionnés à la création de nouvelles réserves… gérées non par la Nouvelle-Calédonie, mais par l’ONG américaine Conservation International.
Pour les pêcheurs, c’est une perte inacceptable de souveraineté : une partie de l’espace maritime local serait bradée contre des financements conditionnés et pilotés depuis l’étranger. À cela s’ajoute une gouvernance jugée déséquilibrée, où les socio-professionnels ne disposent que de 8 voix sur 33 au sein du comité.
La Fédération réclame l’arrêt immédiat des décisions unilatérales, un retour à une gestion locale et partagée, et le respect de la concertation. Elle alerte : à ce rythme, la filière pêche hauturière pourrait disparaître, emportant avec elle des emplois, des savoir-faire et une part de souveraineté calédonienne.
Réaction pour la Dépêche de Nouméa de Mario Lopez, Président de la Fédération des Pêcheurs Hauturiers de la Nouvelle-Calédonie :
La création d’un Fonds calédonien pour la biodiversité peut être une opportunité si elle s’inscrit dans une logique de concertation et d’équilibre. Cependant, elle ne doit pas servir à obtenir des fonds étrangers qui, d’une part, peuvent réduire la souveraineté de la Nouvelle-Calédonie et, d’autre part, financer des mesures décidées sans les pêcheurs, ni affaiblir une filière qui est déjà exemplaire sur le plan environnemental. La pêche hauturière de Nouvelle-Calédonie, 100 % locale et durable, assure notre autosuffisance alimentaire en thons. Elle mérite d’être écoutée et respectée, et non mise de côté au nom d’objectifs qui oublient l’humain et le réel.