La Chambre territoriale des comptes a passé au crible la gestion des deux casinos de Nouméa, le Grand Casino et le Casino Royal, pour la période 2019 à 2024. Si la rentabilité est au rendez-vous, le rapport pointe un cadre juridique qui pourrait être amélioré, et un potentiel touristique encore peu exploité.
Un encadrement juridique à revoir
La gestion des casinos calédoniens repose sur un cadre spécifique, partagé entre l’État et les institutions locales. Les autorisations d’exploiter sont strictes, mais les cahiers des charges signés avec la commune de Nouméa sont jugés trop vagues. Manque de suivi, absence d’objectifs clairs en matière de tourisme ou d’animation : la Chambre recommande à la commune de revoir sa copie d’ici fin 2025, avec des contrats mieux suivis.
Le statut de convention de service public pourrait, selon la jurisprudence, imposer une mise en concurrence, ce qui n’a jamais été fait. Un vide juridique persistant, selon la Chambre, qui appelle à une réforme du cadre réglementaire.
Une gestion centralisée… et profitable
Les deux casinos sont gérés par une même société, la SNC Casino de Nouméa, filiale de la Société des Hôtels de Nouméa, elle-même contrôlée par PromoSud, le bras économique de la Province Sud. Cette structure permet une gestion centralisée et efficace, avec des fonctions mutualisées et une gouvernance satisfaisante.
Côté finances, les résultats sont solides :
- 5,26 milliards de F CFP de produits bruts en 2023
- 90 % des recettes issues des machines à sous
- Un autofinancement en hausse de 44 % entre 2019 et 2023
- Une trésorerie excédentaire, malgré une distribution intégrale des bénéfices aux associés
La politique d’investissement reste timide, avec seulement 59 % des crédits réellement engagés sur la période. Ce qui s’explique principalement par le gouffre financier que représente aujourd’hui Gouaro Deva pour Promosud.
Une contribution fiscale majeure
Entre 2019 et 2024, les deux casinos ont versé :
- 8,8 MdF CFP à la Province Sud
- 2 MdF CFP à la ville de Nouméa
Ces sommes font des casinos des acteurs fiscaux majeurs du territoire.
La restauration, souvent déficitaire, tente de se diversifier (ex. : « Résidence des chefs »). L’animation progresse. L’activité « jeux » reste le pilier central et le plus rentable du modèle.
Addiction, fréquentation, numérique : des efforts notables
La fréquentation, boostée en 2023 après la crise sanitaire, a été freinée par les troubles sociaux de 2024. Les casinos fonctionnent aujourd’hui en mode cashless, permettant une traçabilité accrue.
La société a aussi lancé un programme de « jeu responsable », calqué sur les pratiques métropolitaines, avec prévention, communication et accompagnement. La Chambre salue l’initiative mais demande une mise en œuvre plus complète, notamment pour mieux repérer les comportements à risque.
Recommandations clés de la Chambre des comptes
- Commune de Nouméa : renégocier les cahiers des charges avec des engagements culturels et touristiques concrets (échéance : fin 2025)
- Casino de Nouméa : clarifier les statuts sur la cogérance
- Lancer la rénovation du Casino Royal d’ici 2026
- Mettre en place une planification pluriannuelle des investissements (échéance : 2025)
Des revenus solides, mais un rôle à clarifier
Les casinos de Nouméa génèrent des recettes importantes pour le territoire. Mais au-delà du volet économique, leur utilité touristique, culturelle et sociale reste à structurer.
Interrogé par la rédaction de La Dépêche de Nouméa, Brieuc Frogier, Président de Promosud, nous confie :
Je me félicite de ces conclusions. Tout est perfectible, je sais que la direction des casinos prendra en compte ces préconisations et continuera dans le sens d’une optimisation de ces outils qui sont très importants pour nos collectivités.
Ce qui me gêne, et qu’il faut noter également, c’est que ces très bons résultats sont aujourd’hui engloutis par le gouffre financier de Guaro Deva. Ça rentre dans une poche et ça en ressort par l’autre. Cette structure hôtelière pharaonique, et je pèse mes mots, voulue par Philippe Gomes, est maintenant devenue un puits sans fond que la province Sud, et par corollaire son bras armé Promosud, doit assumer. – Brieuc FROGIER – Président de Promosud