Le 21 juillet à Poya, six bus scolaires ont brûlé. Une semaine plus tard, la brousse calédonienne lance une journée de grève inédite.
Un dépôt de bus incendié, six véhicules réduits en cendres
Poya s’est réveillée dans la fumée et le choc. Le 21 juillet 2025, à l’aube, le dépôt de transport scolaire de la commune est parti en flammes. Six bus, servant quotidiennement à acheminer les élèves, ont été entièrement calcinés. L’origine du sinistre reste à ce jour floue, mais ses conséquences sont immédiates et brutales : des centaines d’enfants privés de moyens de transport, un service public à l’arrêt, et une filière locale en état de choc.
Le traumatisme est immense. Au-delà de la perte matérielle, cet incendie vise un pilier fondamental de l’égalité des chances en milieu rural : le droit à l’école pour tous, quelle que soit la distance. À Poya, comme dans toute la brousse, les kilomètres sont longs et les alternatives inexistantes. Sans bus, pas d’école.
Une grève solidaire à l’échelle du territoire
Face à cette attaque symbolique, la riposte s’organise. Le Collectif des Chauffeurs Scolaires de Brousse appelle à une « journée sans transport scolaire », le mercredi 30 juillet 2025. Un mouvement de solidarité puissant, qui dépasse les frontières communales.
Les communes de La Foa, Bourail, Koné, Canala, Houaïlou, Ponérihouen, Moindou, mais aussi le SIVM Sud ont répondu à l’appel. Ce jour-là, la quasi-totalité des lignes de transport scolaire de brousse sera suspendue.
Même les institutions solidaires peinent à atténuer l’impact : le SIVM Sud, qui alerte sur les conséquences pour les élèves les plus isolés, a tenté de maintenir la ligne La Foa–Bourail, en vain. Les chauffeurs, dans un élan unanime, ont confirmé leur indisponibilité :
On ne peut pas faire comme si de rien n’était.
Le transport scolaire, pilier oublié de la République
Ce mouvement inédit remet au centre du débat un sujet souvent ignoré : la précarité structurelle du transport scolaire en Nouvelle-Calédonie, en particulier dans les zones rurales. Le coût du carburant, la vétusté des véhicules, les conditions d’exploitation, les distances… tout pousse à bout ces professionnels pourtant essentiels.
Le Collectif des Chauffeurs Scolaires de Brousse le rappelle avec force :
Le transport scolaire n’est pas un luxe, c’est un droit.
Il est la condition minimale de la réussite scolaire dans des communes éclatées, sans réseau de transport collectif. Son interruption — même temporaire — accroît les inégalités, surtout après le COVID et les émeutes de 2024, qui ont déjà bousculé les parcours éducatifs de nombreux jeunes.
Les enfants ne doivent pas payer le prix du silence institutionnel. La grève du 30 juillet est un cri d’alarme lancé à l’État, au gouvernement local et aux élus. Car ce n’est pas seulement une ligne de bus qui brûle à Poya. C’est l’avenir de la jeunesse de la brousse qui vacille.