Le 6 août 1945 à 8h15, Hiroshima s’embrase sous le souffle d’une bombe atomique américaine.
Trois jours plus tard, Nagasaki subit le même sort. Plus de 200 000 morts. Le Japon capitule. Le monde découvre l’ère nucléaire.
Deux bombes, deux villes, des centaines de milliers de morts
Le 6 août 1945, l’avion américain Enola Gay largue une bombe à l’uranium, surnommée Little Boy, sur la ville d’Hiroshima. En quelques secondes, 70 000 personnes périssent. La température atteint 4 000 degrés Celsius au sol. Les survivants, gravement brûlés, errent dans un paysage d’apocalypse. Trois jours plus tard, le 9 août, une seconde bombe — au plutonium cette fois (Fat Man) — explose au-dessus de Nagasaki : 40 000 morts immédiats, des dizaines de milliers d’autres dans les semaines qui suivent.
Les deux attaques visent à obtenir la capitulation sans condition du Japon impérial, qui continue de résister malgré les bombardements conventionnels intensifs. Mais c’est aussi une démonstration de force adressée à l’URSS, en pleine négociation pour l’après-guerre.
Le bilan humain est effroyable : plus de 210 000 morts au total d’ici à la fin de 1945, et des centaines de milliers d’autres victimes dans les décennies suivantes à cause des radiations. Les cicatrices physiques et psychologiques persistent encore dans la population japonaise.
Une décision stratégique… ou un crime moral ?
Officiellement, la Maison-Blanche justifie son choix par la nécessité de mettre fin rapidement à la guerre du Pacifique, sans risquer une invasion terrestre du Japon qui aurait causé la mort de centaines de milliers de soldats américains. Le président Harry Truman tranche personnellement. Le Manhattan Project, qui a mobilisé plus de 130 000 scientifiques et 2 milliards de dollars, entre dans l’histoire sous une lumière sombre.
Pour ses partisans, l’usage de la bombe a évité une guerre longue et sanglante. Pour ses détracteurs, c’est un crime contre l’humanité : des villes civiles ont été ciblées délibérément, sans avertissement. En 1946, le rapport médical de l’armée américaine tente de minimiser les effets à long terme, alors que les cas de leucémie, de malformations et de cancers explosent.
En 1945, aucun cadre juridique international n’interdit l’usage de l’arme atomique, mais l’horreur des images va profondément marquer l’opinion mondiale. Des voix comme celle d’Albert Einstein, qui avait pourtant soutenu le développement du projet, se lèvent ensuite pour condamner l’usage militaire de la science.
Mémoire, culpabilité et dissuasion : le lourd héritage atomique
Depuis 80 ans, Hiroshima et Nagasaki sont devenus des symboles universels de la mémoire des victimes civiles de guerre. Au Japon, la culture des hibakusha (les survivants irradiés) reste vivace. Ces témoins poursuivent encore aujourd’hui leur combat pour le désarmement nucléaire et la reconnaissance des souffrances endurées.
Les États-Unis, quant à eux, n’ont jamais officiellement présenté d’excuses pour les bombardements. Barack Obama a été le premier président américain à se rendre à Hiroshima, en 2016, mais sans formuler de demande de pardon, au nom d’une lecture historique pragmatique : la guerre était totale, et les choix, terribles.
La dissuasion nucléaire reste fondée sur la mémoire d’Hiroshima. Les arsenaux se sont multipliés, les doctrines se sont complexifiées, mais la peur de l’annihilation mutuelle est toujours là. En 2024, neuf États possèdent officiellement l’arme nucléaire. La prolifération inquiète, et les tensions géopolitiques — Ukraine, Taïwan, Iran — ravivent les pires scénarios.
Chaque année, le 6 août, les sirènes retentissent à Hiroshima. Des milliers de lanternes flottent sur la rivière Motoyasu. La paix est commémorée dans le silence. Mais l’ombre du champignon atomique plane toujours sur notre avenir.