Depuis la crise sociale de 2024, un phénomène inquiétant bouleverse la route calédonienne : les taxis clandestins, surnommés « Taxi 1000 », se multiplient, au détriment des professionnels patentés.
Une crise sociale qui pousse à l’informel
Depuis les émeutes de mai 2024, l’économie calédonienne encaisse des secousses. Des centaines de personnes ont perdu leur emploi, notamment dans les zones urbaines de Nouméa, Païta et Dumbéa. Or, dans un contexte de raréfaction des transports en commun, conjugué à l’explosion des tarifs des bus et des navettes, bon nombre de Calédoniens ont choisi de se reconvertir à la hâte en chauffeurs de taxi… sans en avoir ni le droit, ni les compétences exigées.
Appelés dans la rue « Taxi 500 » ou « Taxi 1000 », ces chauffeurs non déclarés exercent sans licence, sans examen, sans assurance adaptée, et souvent sans visite médicale.
Si certains y voient une solution de survie, les taxis professionnels y voient une menace directe pour leur métier, d’autant plus qu’une licence officielle peut coûter jusqu’à 20 millions de francs CFP.
Une concurrence jugée déloyale par les professionnels
À Païta, comme ailleurs sur le Grand Nouméa, les chauffeurs officiels tirent la sonnette d’alarme. Examen obligatoire, cotisations sociales, contrôles techniques, fiscalité : le cadre légal est strict pour ceux qui respectent la loi.
On nous demande d’être irréprochables, pendant qu’à côté, des voitures banalisées opèrent sans rien déclarer, dénonce un chauffeur titulaire joint par nos soins.
Face à cette concurrence sauvage, les autorités ont mobilisé le COTAF (Comité opérationnel territorial anti-fraude), sous l’égide du Haut-Commissariat, pour mener une opération coup de poing à Païta.
Objectif : frapper fort et marquer les esprits.
L’opération COTAF à Païta : une riposte coordonnée
Une vaste opération interservices a été menée sur le territoire de Païta. Plusieurs acteurs institutionnels ont été mobilisés pour endiguer le phénomène des taxis illégaux :
La Gendarmerie nationale (BTA Païta & BMO)
La DITTT (Direction des Infrastructures, de la Topographie et des Transports terrestres)
La DSF (Direction des Services fiscaux)
La DTEFP (Direction du Travail, de l’Emploi et de la Formation Professionnelle)
La CAFAT
La PAF (Police aux Frontières)
Cette action conjointe poursuivait trois objectifs principaux : dissuader les pratiques illégales, rassurer les professionnels en règle et vérifier le respect des lois fiscales, sociales et routières.
Les résultats sont parlants :
1 procédure pour travail dissimulé
14 fiches CAFAT établies pour vérifier les statuts d’activité
2 infractions routières relevées (non-port de la ceinture, absence de visite médicale)
Le message est clair : ces pratiques ne peuvent plus perdurer sans conséquences, souligne un représentant du Haut-Commissariat.
Une opération qui devrait être reconduite régulièrement, tant le phénomène prend de l’ampleur.
Vers une régulation plus ferme du transport de personnes ?
Le cas des taxis clandestins de Païta pose une question brûlante : comment réguler un secteur en pleine informalisation sans aggraver la précarité des personnes concernées ?
Si la colère des taxis professionnels est légitime, la détresse sociale à l’origine de ces reconversions sauvages ne peut être ignorée.
Certains évoquent la nécessité de créer un statut intermédiaire, permettant à des chauffeurs occasionnels de se régulariser rapidement, sous certaines conditions.
D’autres réclament une reprise en main ferme du secteur, quitte à renforcer encore les contrôles.
Quoi qu’il en soit, le sujet est explosif et pourrait bien devenir un thème de débat politique en 2026, tant il reflète les fractures sociales et territoriales de la Nouvelle-Calédonie post-crise.