Depuis les émeutes du 13 mai 2024, la Nouvelle-Calédonie vit une véritable hémorragie médicale. Près de 80 médecins ont demandé leur radiation, soit près de 10 % des effectifs, et rien qu’en juin, trente praticiens ont quitté le territoire. Au Mont-Dore, près de la moitié des généralistes ont disparu. Le Médipôle, lui, a perdu une centaine d’infirmiers et de médecins, provoquant la fermeture de cent lits.
Les conditions d’exercice ont été bouleversées. J’ai subi deux agressions lors de visites à domicile. Ma sécurité est affectée,
confie une généraliste.
Des cabinets incendiés, des urgences saturées
Les violences ont aggravé le chaos : 20 cabinets médicaux incendiés, 5 saccagés. Certains médecins travaillent désormais par téléphone ou par mail, envoyant des ordonnances comme ils peuvent.
Mon cabinet a brûlé, je consulte grâce à des confrères. C’est un fonctionnement plus que dégradé,
témoigne le Dr Paul Béjan.
Les conséquences se voient immédiatement : consultations divisées par deux, urgences saturées, délais interminables. Au Médipôle, la moitié des blocs opératoires sont fermés.
Médecine de ville exsangue
Les libéraux croulent sous la pression.
Nous tirions la sonnette d’alarme avant même le 13 mai,
rappelle la présidente du syndicat des médecins libéraux. Les rendez-vous sont pris d’assaut, les horaires rallongés, mais cela ne suffit pas.
Le tarif des consultations reste figé à 4 250 F CFP, un montant dérisoire face à l’inflation et aux contraintes administratives. Résultat : épuisement, burn-out, et cabinets fermés faute de remplaçants.
Urgences en surchauffe
Avec seulement 50 % des effectifs, les urgences sont à la limite du point de rupture. La clinique a réduit ses horaires et renvoie ses patients au Médipôle. Un homme est même mort d’un arrêt cardiaque sur le parking de l’hôpital de Koumac, portes closes.
Plus personne ne veut venir durablement. La première question, c’est : est-ce sûr en Nouvelle-Calédonie ?
avertit le Dr Vincent Fardeau.
Une santé en état d’urgence
Au total, 250 départs en un an. Tindu, Kaméré, Rivière-Salée n’ont plus de médecins. Les parents alertent sur la santé mentale des jeunes, totalement sinistrée.
Le sondage de juillet dernier est sans appel : 72 % des Calédoniens réclament santé, emploi et sécurité comme priorités absolues. Mais les radicaux, eux, campent encore sur le débat des symboles.