L’économie polynésienne avance mais reste fragile. Derrière les chiffres officiels, un ralentissement se dessine, reflet d’une dynamique à bout de souffle.
L’IEOM alerte : les crédits stagnent, l’épargne faiblit, la dette locale progresse.
Crédits en perte de vitesse, entreprises sous pression
Le rapport 2025 de l’IEOM Polynésie française met en lumière un constat clair : la progression de l’encours des crédits ralentit. Fin juin, la hausse n’est que de 3,1 % sur un an, contre 6 % un an plus tôt. Le décrochage est flagrant chez les entreprises : leur recours au crédit plafonne à +0,3 % seulement, après +8 % en 2024. La principale explication réside dans la chute des crédits d’exploitation (-12,5 %), signe que l’activité peine à s’autofinancer.
Seule consolation : les crédits d’investissement (+7,7 %) et immobiliers (+6,5 %) amortissent la chute. Mais cette orientation révèle aussi une dépendance inquiétante aux financements externes. L’économie locale vit sous perfusion bancaire, sans véritable relance de productivité.
Ménages et collectivités locales, piliers du financement
Si les entreprises s’essoufflent, les ménages restent le moteur principal du système. Leurs crédits progressent de 4,7 % sur un an, tirés par la consommation (+8,1 %) et l’habitat (+4,3 %). C’est la preuve d’une confiance des foyers polynésiens, même dans un contexte économique tendu.
Les collectivités locales, elles, connaissent une envolée spectaculaire : +10,4 % de crédits en rythme annuel, surtout grâce à l’investissement (+16,1 %). Derrière ces chiffres, une réalité : le secteur public continue d’alimenter la croissance, au prix d’un endettement accru.
Mais cette mécanique n’est pas sans risque. L’encours douteux brut progresse de 9,9 % sur un an pour atteindre 21,5 milliards XPF. Le taux de créances douteuses, même limité à 2,9 %, traduit un signal d’alerte. La baisse du taux de provisionnement (53,4 % contre 55,7 %) ajoute un élément de fragilité supplémentaire.
Épargne et position extérieure : un équilibre précaire
Côté dépôts, la croissance ralentit : +3,1 % sur un an, après +4,3 % en 2024. Les ménages tiennent encore la barre (+3,2 %), mais les entreprises réduisent leur effort d’épargne (+2 % seulement). L’attrait des dépôts à terme s’effondre (+6,2 % après +58 % en 2024), conséquence directe de la détente des taux d’intérêt. Résultat : la masse monétaire M3 ne progresse que de 2,4 %, moitié moins que l’an dernier.
La bonne nouvelle vient de l’extérieur : la position extérieure nette atteint 70,7 milliards XPF, en hausse de 4 milliards. Mais ce léger renforcement ne compense pas le déficit du solde emplois-ressources clientèle (-6,2 milliards XPF), là où un excédent existait encore en 2024.
En clair : la Polynésie vit au-dessus de ses moyens bancaires. La stabilité actuelle repose sur les lignes de refinancement de l’IEOM, autrement dit sur le soutien de la France.