Conseillère municipale de Dumbéa et membre active du camp loyaliste, Cynthia Jan s’impose peu à peu comme une voix à suivre. Entre souvenirs douloureux des émeutes, volonté d’unité et ambitions municipales, elle livre un message à la fois combatif et ancré dans le réel.
Bougival : ramener les élus à la réalité
Pendant dix jours, elle a accompagné la délégation loyaliste à Bougival, en métropole, lors des négociations institutionnelles. Elle insiste sur ce rôle discret mais essentiel :
Quand on accompagne nos élus en négociation, c’est pour les ramener à la réalité de ce que vivent les gens au quotidien. Il faut leur rappeler pourquoi ils se battent et quelles sont les attentes des Calédoniens.
Dans une période où la technique et le droit peuvent éloigner les politiques des préoccupations du terrain, Cynthia Jan veut se poser en garde-fou : rappeler que la légitimité se construit toujours au contact des habitants.
L’union loyaliste comme impératif
Elle balaie d’un revers l’idée d’une union de circonstance. Pour elle, c’est un choix stratégique et vital :
On n’a plus le luxe de se diviser entre non-indépendantistes. L’union est une nécessité, pas une option.
La progression électorale des indépendantistes agit comme un électrochoc. Là où les querelles d’appareil pouvaient autrefois prospérer, la conseillère municipale voit désormais une exigence de responsabilité collective. « Les gens nous demandent de travailler ensemble, et chaque jour on me remercie de contribuer à cette unité », ajoute-t-elle.
Dumbéa, ville sinistrée et symbole d’un pays ébranlé
Le 13 mai reste une blessure ouverte. La commune a été l’une des plus touchées : 80 % de son tissu économique détruit, des commerces emblématiques partis en fumée. Cynthia Jan n’a pas oublié ces journées où la peur s’est installée jusque dans les foyers.
Le 13 mai, ce sont les voisins vigilants et les citoyens qui ont protégé leurs commerces et leurs quartiers. Sans eux, je ne sais pas ce que serait devenue notre commune.
Derrière ce constat, une critique implicite : l’État, débordé dans les premières heures, n’a pas su répondre à la hauteur du chaos. Ce sont les habitants qui, organisés spontanément, ont tenu les murs. Pour la conseillère municipale, ce courage populaire doit être reconnu.
Refuser l’oubli, assumer la mémoire
Là où d’autres plaident pour « tourner la page », Cynthia Jan se montre inflexible. Elle revendique le devoir de mémoire comme une condition de la reconstruction :
Il ne faut pas faire comme si le 13 mai n’avait pas existé. C’est une empreinte indélébile qui doit nous obliger à repenser Dumbéa, à innover et à éviter que l’histoire se répète.
Elle raconte son quotidien de mère de famille dans un quartier populaire de Dumbéa, loin des villas sécurisées de Nouméa Sud. Elle assume d’avoir choisi le « vivre ensemble » non comme un slogan, mais comme un mode de vie. Et c’est précisément pour cette raison qu’elle se dit meurtrie par l’incendie des commerces et des infrastructures qui faisaient battre le cœur de la ville.
Des priorités ancrées dans le concret
À l’heure de la reconstruction, Cynthia Jan ne veut pas tomber dans les promesses creuses. Son équipe travaille sur un programme qui sera présenté début 2026. Mais les grandes lignes sont déjà tracées :
Le nord de la commune se sent totalement oublié depuis trop longtemps. Ce que je veux porter, c’est la proximité et l’écoute, pour que chaque Dumbéen retrouve confiance dans sa ville.
La sécurité, le logement social, la justice territoriale seront au cœur du projet. Elle entend surtout donner une place centrale aux habitants, en multipliant les phases de consultation.
Entre fidélité au camp loyaliste et ambition municipale, Cynthia Jan incarne une génération qui refuse les compromis mous. Son message est clair : sans mémoire, pas de reconstruction ; sans unité, pas d’avenir ; sans proximité, pas de confiance.