CHRONIQUE. En pleine tourmente, LFI enchaîne les scandales : dérives communautaristes, outrances verbales et stratégie du chaos. Une fuite en avant qui, selon l’essayiste Paul Melun, éloigne le mouvement de l’idéal républicain et du peuple français.

En seulement quelques jours, un parlementaire La France insoumise s’est recueilli sur la tombe des terroristes de l’attentat des JO de Munich au Liban, un élu a claqué la porte du mouvement en dénonçant son infiltration par les Frères musulmans, tandis que le brillant journaliste et écrivain franco-syrien, Omar Youssef Souleimane publiait un essai édifiant sur les liens entre les islamistes et La France insoumise. Une semaine banale, en somme, pour ce parti à la dérive, de plus en plus mis en cause pour son outrance verbale et ses liaisons dangereuses.
Cerise sur le gâteau, un sondage Odoxa nous apprend que 58 % des Français se disent désormais prêts à faire barrage à La France insoumise, contre seulement 46 % face au Rassemblement national. Une précédente enquête d’opinion pour Le Monde, réalisée en 2024 montrait déjà à quel point les Français jugeaient sévèrement le parti de Jean-Luc Mélenchon. 74 % des sondés déclaraient que LFI était « une formation d’extrême gauche » et 72 % que le mouvement « attise la violence ».
Mais pourquoi un tel naufrage ? Pourquoi ce parti s’est-il ainsi enfoncé dans la fange du communautarisme et de la provocation permanente ? Quelle est la stratégie de Jean-Luc Mélenchon ? La réponse tient en trois mots : clivage, violence et reniement.
Fidéliser une minorité radicale
D’abord, LFI clive le pays. En s’isolant du reste de la gauche, Jean-Luc Mélenchon a choisi de transformer LFI en machine populiste plutôt qu’en force de gouvernement. Son objectif n’est plus de convaincre une majorité de Français, mais de fidéliser une minorité radicale, bruyante et hyper-mobilisée. Dans cette logique, tout électorat vaut or, surtout celui qu’aucun autre parti ne courtise : celui des jeunes urbains en mal de révolution, des quartiers ou de l’électorat musulman.
Pour le capter, LFI flatte, justifie, excuse. Le parti ferme les yeux sur l’antisémitisme quand il vient d’un certain camp, laisse faire l’islamisme, et accuse quiconque s’en émeut d’« islamophobie ». C’est le grand renversement moral : les bourreaux deviennent victimes, et les républicains, soucieux de la laïcité sont accusés de « stigmatisation ».
La France insoumise a renoncé à l’héritage universaliste de la gauche
Ensuite, la violence. LFI est devenue le miroir inversé de l’extrême droite d’antan. Le même goût pour la provocation, la même fascination pour la rue contre les institutions, la même détestation des médias, de la police, des juges, de tout ce qui incarne l’État républicain. Le discours mélenchoniste s’est peu à peu saturé de ressentiment. Il ne cherche plus la justice, mais la vengeance ; il ne promet plus le progrès, mais le chaos. C’est une gauche sans amour, sans fraternité, sans peuple – une gauche de la colère, des slogans violents, qui réhabilite les vieux fantasmes révolutionnaires sur les réseaux sociaux.
Enfin, le reniement. La France insoumise a renoncé à l’héritage universaliste de la gauche. Le parti de Jaurès, de Blum et de Mendès France, celui qui plaçait la République, la laïcité et l’émancipation au-dessus de tout, s’est mué en une boutique identitaire où l’on distribue des certificats de pureté militante, tout en traitant tous ceux qui n’en sont pas pourvus de « fascistes ». Au lieu de défendre la cohésion nationale, on encourage les différences comme autant de drapeaux. LFI a trahi ce qu’il y avait de plus noble dans la gauche : la foi en l’humain avant le clan (faudrait-il dire avant « la Meute »).
Le vote communautaire est le dernier refuge d’un mouvement incapable de parler au peuple français dans son ensemble. LFI se rabat sur des fragments de société, des clientèles captives, des groupes identifiés non plus par leurs idées mais par leurs origines ou leurs croyances. Ce calcul électoral, qui consiste à draguer les minorités religieuses ou ethniques en flattant leurs susceptibilités, les maintenant dans le statut de victime éternelle, est une faute politique et morale majeure. C’est la porte ouverte à la libanisation du pays.
À force de hurler contre tout, la parole de LFI est démonétisée
Notre pays s’est construit sur une idée magnifique : celle que l’on pouvait être Français par adhésion, et non par appartenance. Qu’on pouvait partager un destin commun malgré nos origines, nos croyances, nos couleurs. LFI, en exaltant le communautarisme, piétine cet idéal. Elle ne veut plus faire peuple, mais opposer des minorités à une soi-disant majorité réactionnaire. Elle ne rêve plus de République, mais de tribus.
Enfin, elle est dangereuse pour elle-même. Car à force de hurler contre tout, la parole de LFI est démonétisée. Elle ne rassemble plus : elle effraie. Les Français, dans leur immense majorité, ne veulent pas d’une société à l’image du Palais-Bourbon, où des députés dépenaillés hurlent et s’agitent en bordélisant le pays. La gauche ne renaîtra pas dans la colère, mais dans la fidélité à ce qu’elle fut de plus beau : le refus de toutes les tutelles, qu’elles soient religieuses, communautaires ou idéologiques. En trahissant cet héritage, LFI a perdu le peuple, et c’est tant mieux.
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