Deux jours d’affrontements feutrés, des couloirs surchauffés et une tension presque palpable : l’Assemblée nationale a vécu un moment de vérité.
Car derrière les sourires de façade, la gauche espérait infléchir une ligne budgétaire que la majorité macroniste refuse obstinément de bouleverser.
LA GAUCHE EN ORDRE DE BATAILLE… MAIS INCAPABLE DE S’ENTENDRE
Depuis plusieurs jours, les débats du budget 2026 tournent au bras de fer idéologique. La gauche pensait profiter d’un moment politique : inflation persistante, entreprises florissantes, inquiétudes sociales… Une configuration idéale, selon elle, pour imposer une réforme choc sur la fiscalité des plus riches.
Mais l’effet de puissance n’aura duré que quelques heures.
Dès le matin, Guillaume Kasbarian, ancien ministre et figure des macronistes, a donné le ton.
C’est Halloween, et nous allons disséquer des horreurs fiscales toute la journée, lâche-t-il, en manière assumée de torpiller la taxe Zucman, étendard fantasmé de la gauche radicale.
L’hémicycle, presque plein, comprend alors que la journée sera déterminante.
L’amendement écologiste, présenté par Éva Sas, proposait un impôt minimum de 2 % sur les patrimoines dépassant 100 millions d’euros (12 milliards de francs CFP). Une promesse simple, symbolique, et taillée pour séduire les bancs rouges et verts. Après deux heures de joute et de contre-arguments constitutionnels, le verdict tombe : 228 voix contre, 172 pour. Un revers attendu, mais un revers quand même.
Le PS, déjà fragilisé, tentera aussitôt de sauver la face avec une version allégée, qualifiée de « light » : 3 % à partir de 10 millions d’euros (1,2 milliard de francs CFP), en épargnant les entreprises familiales et innovantes. Une tentative de compromis comme seuls les socialistes en ont encore le secret.
Mais là encore, rejet massif : 171 pour, 228 contre. Deux défaites en moins de trois heures. Une humiliation politique.
Dans la foulée, Mathilde Panot (LFI) se déchaîne contre le PS, accusé d’avoir cru au marchandage avec les macronistes :
La seule solution, c’est la censure et la fin du macronisme.
Les masques tombent : la gauche n’est même plus capable de défendre une stratégie commune.
LE PS ACCULÉ PAR SES ALLIÉS, LECORNU IMPERTURBABLE
À la reprise de la séance, le président du groupe PS Boris Vallaud tente une contre-offensive morale. Il sermonne Sébastien Lecornu sur la « responsabilité du compromis ». Il rappelle que le PS a préféré débattre plutôt que « livrer la France aux bonimenteurs du RN ». Une pique à peine voilée, mais surtout une tentative d’exister.
Lecornu, lui, ne bronche pas. Le Premier ministre reste droit dans ses bottes, fidèle à une ligne : pas d’impôt miracle, pas de fiscalité punitive, pas de symbole idéologique.
La gauche espérait que le déjeuner entre Lecornu et les dirigeants socialistes, révélé par France Inter, débloquerait quelque chose. Mais Olivier Faure coupe court dans l’après-midi : « Nous n’avons pas avancé ». Autrement dit : rien, absolument rien n’a été concédé.
Le PS menace alors, comme souvent, de déposer une motion de censure. Une habitude, presque un réflexe, devenu l’unique arme d’un parti qui peine à retrouver son souffle.
Arthur Delaporte, porte-parole socialiste, l’admet :
La pente n’est pas la bonne.
Mais il veut croire que le débat continue, notamment autour du rétablissement de l’ISF, sujet fétiche de la gauche divisée.
Dans le même temps, la gauche dénonce le « faible rendement » de la taxe sur les multinationales, adoptée plus tôt dans la journée mais largement modifiée par la droite, qui s’est appliquée à en retirer la dimension punitive. Une victoire de la droite assumée, qui refuse de voir la France se couper de son attractivité économique.
LE CORPS CENTRAL DU MACRONISME S’ASSUME : PAS D’IMPÔT-SPECTACLE
Sébastien Lecornu clôt finalement la journée dans un style direct, cohérent et sans détour. Il répète son désaccord « profond » avec une gauche qu’il juge déconnectée :
Il n’existe pas d’impôt miracle, martèle-t-il.
Et surtout pas un impôt « à fort rendement » qui tienne debout devant le Conseil constitutionnel.
C’est là le cœur du macronisme : un réalisme technocratique, que la gauche qualifie de rigidité mais qui reste la colonne vertébrale du gouvernement.
Lecornu consent néanmoins un geste social : renoncer au gel des pensions et des minima sociaux, une concession budgétaire ciblée, loin de la taxation massive prônée par les socialistes.
Un geste technique, pensé, limité. Un geste qui tranche avec l’approche spectaculaire et punitive de la gauche sur la question des richesses.
À l’arrivée, le message est limpide :
La France ne construira pas son budget sur des symboles idéologiques.
La fiscalité punitive ne passera pas.
Et surtout : le gouvernement ne sera pas dicté par les velléités d’une gauche fracturée.















