Le lancement du Khabarovsk, le 2 novembre, consacre une nouvelle ère dans la dissuasion russe : ce sous-marin a été conçu pour déployer le Poseïdon, torpille nucléaire autonome capable d’anéantir des villes côtières.

Si la flotte de surface russe traverse une période difficile, Moscou continue de se distinguer dans le domaine des sous-marins. Le 2 novembre, la Russie l’a de nouveau démontré depuis le chantier naval Sevmash, sur la mer Blanche. La cérémonie, présidée par le ministre de la Défense Andreï Beloussov et l’amiral Alexandre Moïseïev, souligne un moment fort pour la marine russe, au moment où Washington réfléchit à relancer ses propres essais nucléaires. « Aujourd’hui est un jour important pour nous : le croiseur lourd à propulsion nucléaire Khabarovsk est mis à l’eau », a déclaré Beloussov.
Peu de détails techniques sur ce nouvel engin ont été révélés. Ni sa longueur, ni son tonnage exact n’ont été confirmés. Le ministère de la Défense s’est contenté d’indiquer que le Khabarovsk sera destiné à la mise en œuvre de nouveaux systèmes sous-marins autonomes. Un second bâtiment, l’Oulianovsk, est déjà en construction à Sevmash, sans calendrier de lancement annoncé. Construit à partir de 2014, le Khabarovsk reprend les lignes générales des sous-marins de la classe Boreï, mais a été repensé pour intégrer des « systèmes d’armes robotiques à usages multiples », selon la terminologie officielle du ministère.
Cette désignation fait référence aux torpilles Poseïdon, véritables drones sous-marins nucléaires et l’une des armes les plus ambitieuses du programme stratégique russe. Quelques jours avant le lancement du Khabarovsk, le 27 octobre, Vladimir Poutine avait annoncé un test réussi de la torpille nucléaire Poseïdon. « Pour la première fois, nous avons activé son unité de propulsion nucléaire », a affirmé le président russe, évoquant un « succès complet ».
Présentée en 2018 parmi les armes dites « invincibles », la torpille Poseïdon — code OTAN Kanyon — est conçue pour la dissuasion stratégique. Selon les informations communiquées par les autorités russes et reprises par l’agence TASS, elle serait propulsée par un petit réacteur nucléaire et capable de parcourir de très longues distances sous-marines avant de frapper des cibles côtières. « Aucun autre appareil dans le monde n’est égal à celui-là par sa vitesse et la profondeur » à laquelle il opère, a encore assuré le maître du Kremlin. Avant d’affirmer qu’il n’existait « aucun moyen de l’intercepter ».
La Russie détient le plus grand arsenal nucléaire au monde
TASS précise que le Poseïdon peut évoluer à plus d’un kilomètre de profondeur, à une vitesse estimée entre 60 et 70 nœuds (environ 130 km/h), tout en restant difficile à détecter. Ce message vise autant les laboratoires militaires que les chancelleries occidentales : la Russie entend rappeler qu’elle conserve une capacité d’innovation dans la dissuasion nucléaire.
À l’heure où les États-Unis envisagent de relancer des essais nucléaires et que la Chine accélère la modernisation de son arsenal, la Russie place le Khabarovsk et le Poseïdon au cœur de sa stratégie, réaffirmant sa puissance nucléaire. Selon les estimations de l’Institut international de recherche sur la paix de Stockholm, l’ours russe détiendrait un total de 4 309 ogives nucléaires pour l’année 2025. Soit le plus grand arsenal au monde.
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